Vies et morts de Stanley Ketchel, un rêve américain
Un auteur ambitieux
D’origine mexicaine et irlandaise, James Carlos Blake a eu plusieurs vies avant de devenir écrivain. Il est l’auteur d’une dizaine de romans : citons L’Homme aux pistolets (Rivages, 2001) qui raconte l’histoire du bandit John Wesley Hardin (à qui Bob Dylan a consacré un disque), Crépuscule sanglant (Rivages, 2002) et Handsome Harry (Gallmeister, 2019). Entre roman historique et roman noir, l’œuvre de Blake est ancrée dans l’imaginaire américain et Vies et morts de Stanley Ketchel en est une nouvelle preuve.
Hors la boxe, point de salut
Il s’appelle Stanley Ketchel, il est fils d’immigrés polonais. Il a fui un père violent qui le détestait, a pris son baluchon et est devenu un « hobo », un vagabond qui voyage en se cachant dans les trains de marchandises. Il finit par arriver à Butte, devient mineur et se fait remarquer pour deux choses. D’abord, il sait plaire aux prostituées, un peu plus âgées que lui et ensuite, il sait se servir de ses poings et la boxe finit par l’attirer :
La boxe professionnelle était une occupation bien plus dure à cette époque. Dans certains états, la boxe était totalement interdite et dans d’autres, où elle ne l’était pas, la police se tenait toujours prête à interrompre un combat dès qu’un des boxeurs donnait l’impression qu’il allait finir estropié. Toutefois, dans la plupart des salles de combat légales, on laissait même les affrontements les plus inégaux se poursuivre sur le nombre de rounds prévu tant que le boxeur dominé n’était pas mis K.O. Ou tant qu’il n’abandonnait pas.
Alors Stanley Ketchel apprend à boxer. Et s’entraîne. Et devient très bon. Il gagne beaucoup d’argent, ce qui lui permet d’aider sa mère. Les femmes, la célébrité : Ketchel a tout pour lui. Champion du monde des poids moyens, il décide d’affronter en 1909 le champion du monde des poids lourds, le noir Jack Johnson. Et il perd. C’est insupportable pour Ketchel qui veut une revanche… qu’il n’aura jamais.
Un roman américain
Vies et morts de Stanley Ketchel est inspiré de faits réels : Ketchel a vraiment existé, a rencontré Jack London et son combat contre Jack Johnson (à qui le grand Miles Davis a dédié un disque fameux en 1971) a déchaîné les passions. C’est donc un roman basé sur un stéréotype typiquement américain : l’ascension et la chute d’un fils d’immigrant devenu boxeur, dans la violence et le sang (les amateurs de cinéma auront reconnu ici le canevas du Champion ou de Rocky). C’est enfin et surtout un très bon roman qui offre une occasion de revisiter un moment de l’histoire américaine, entre la fin de la conquête de l’Ouest et la naissance d’une société industrielle.
Très recommandé.
Sylvain Bonnet
James Carlos Blake, Vies et morts de Stanley Ketchel, traduit de l’anglais par Elie Robert-Nicoud, Gallmeister, mars 2021, 384 pages, 23,80 euros