Outback, le polar australien de Kenneth Cook


Un polar à l’ancienne

Kenneth Cook, disparu en 1987, est l’auteur australien le plus célèbre. En France, toute son œuvre est publié chez Autrement. Dans la veine des polars de Dashiel Hammet ou Raymond Chandler, Outback pose cependant un cadre beaucoup plus exotique que les Etats-Unis ! Et les paysages ne pèsent pas rien dans ce roman, le titre désignant l’arrière-pays quasi désertique, au-delà du Bush, sorte d’immense no man’s land local.

Johnson avait étalé son argent sur une roche plate et le comptait billet par billet. L’argent était comme une sorte de démenti rassurant face à l’image en noir et blanc du bush et de l’outback au clair de lune. » 

Un casse qui tourne mal 

Johnson est une petite frappe qui accumule les erreurs irréparables. Alors qu’il vient de voler une bijouterie en pleine nuit et qu’il s’en échappe il tombe nez à nez avec un flic qui fait sa ronde. La réaction de Johnson, surpris, est très violente : il défonce le crâne du pauvre policier, aussi dépassé qu’ahuris, et le laisse pour mort.

Si un habitant n’avait pas vu la scène de sa fenêtre, il aurait pu s’en tirer, mais la police déboule en nombre et Johnson est très vite cerné.

Par différents subterfuges et beaucoup de chance, il parvient à s’enfuir mais dans sa déroute il tue un autre policier. Cela commence à faire beaucoup ! Du coup, toutes les polices sont lancées à ses trousses, ainsi que des chasseurs de prime appâtés par la récompense promise, et sa fuite le conduit dans le Bush.

Parallèlement, le journaliste de la télévision locale Ben Davidson essaie à tout prix de suivre cette échappée sauvage pour en retirer les meilleures images, mais une lutte acharnée prend place également dans la rédaction de cette même chaine.

Qui sortira gagnant de cette traque, le pourchassé, les pourchassant ?

Davidson sourit face à sa bière. Il se demanda si tous réagissaient comme lui. Est-ce qu’ils étaient tous prêts à bouleverser le monde pour obtenir un beau reportage ? »

Une ode à la chance

On imagine que le dénouement de l’histoire sera expédié en vingt pages, car l’auteur de ce crime odieux n’a aucune chance. Mais non, ce balbutiant criminel profitera d’une chance incroyable et s’extirpera de tous les traquenards, quels qu’il soient, enfin presque.

Ce qui donne un caractère curieux à cette histoire, c’est le destin partagé par les deux protagonistes, le tueur et le journaliste.

Dans cette chasse à l’homme, ils vont se croiser à plusieurs reprises, se percuter. Quand l’un tente l’impossible pour survivre et s’extirper de cette fâcheuse situation qui le dépasse largement, le second en prenant tous les risques souhaite obtenir le reportage du jour, de l’année, de sa vie. Tous deux sont confrontés à la réalité, qui va les écraser chacun à sa manière. La police pour l’un, la corruption au sein de la chaine de TV pour l’autre. De cette double fuite en avant, Kenneth Cook fait avec Outback le portraits d’hommes pris entre l’immensité et le vide, pris entre les vains espoirs de liberté et la folle envie d’exister malgré tout.

Xavier de La Verrie

Kenneth Cook, Outback, Autrement, avril 2019, 240 pages, 19 eur

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