Chaque homme, une menace, des criminels interdépendants

De l’expérience acquise pour devenir écrivain de polar 

On ne fera pas ici la présentation de Patrick Hoffman car Chaque homme, une menace est son premier roman traduit et publié par la Série noire. Gageons cependant que son expérience professionnelle — dix ans au bureau d’aide juridictionnelle et maintenant enquêteur privé à Brooklyn — lui ont donné matière à écrire des romans policiers noirs. Chaque homme, une menace parle de l’ampleur du trafic de drogue et de ses répercussions sur deux continents, l’Asie et l’Amérique. Beau projet, allons voir désormais ce qu’il y a sous le capot de ce roman. 

Les vivants bientôt morts 

A San Francisco de nos jours. Raymond Gaspar est envoyé surveiller l’acheminement d’une cargaison de cinquante tonnes de MDMA par son copain Arthur, le grand manitou qui dirige un réseau de trafiquants depuis sa prison. Gaspar rencontre ses correspondants, la philippine Gloria et l’indien Shadrack, garde un œil ouvert mais malheureusement pas les deux. A Miami, le trafiquant Semion Gurevich a la belle vie. Avec son associé Isaak, israélien comme lui, il a monté un trafic de came avec la Thaïlande qui lui permet de se la couler douce. Mais voilà, il rencontre Jackie : 

Elle portait des talons rouges et une robe blanche. Une voile gonflée par le vent, songea-t-il. L’Ecsta et la vodka qui circulaient dans son corps exacerbaient sa fibre poétique. Elle tenait un petit sac à main et, quand il en envisagea le contenu, l’image d’un bâton de rouge à lèvres se forma dans son esprit. Si j’étais ce bâton, je magnifierais sa bouche. »

 Semion est loin de se douter qu’il met le doigt dans un engrenage qui le mènera à sa perte. En Thaïlande, Moisey Segal sera victime de son goût pour les garçons… Cela l’amènera à jouer un rôle funeste dans le destin de Semion, un pion dans un trafic entre plusieurs continents… 

Un roman de notre temps

Bienvenue dans un monde « mondialisé » où tout le monde peut se fournir sa dose pour fuir une réalité bien crade ! Chaque homme, une menace décrit un système qui s’est mis en place pour la distribution de la drogue aux masses. Il est dur, violent, parfois poignant. Pourquoi ? Parce qu’au fond, ce roman décrit l’effet papillon : un évènement à l’autre bout du monde entraîne des bouleversements jusqu’en Amérique.

Patrick Hoffman livre ici, si on recoupe avec ce que dit la presse, une description réaliste du trafic de drogue, manifestation perverse du capitalisme. Effet coup de poing garanti. 

Sylvain Bonnet

Patrick Hoffmann, Chaque homme, une menace, traduit de l’anglais par Antoine Chainas, Gallimard « série noire », février 2019, 304 pages, 20 eur

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