Le livre de M, voici la fin du monde
Le début d’une carrière
On ne va pas ici présenter la carrière de Peng Sheperd, ses premiers livres etc. Car Le Livre de M constitue son premier roman, récompensé outre-Atlantique, récompensé par le Neukoln Award 2019 : soit. Le bouche à oreille est plutôt favorable, voire dithyrambique sur ce roman. Disons déjà qu’il est d’une actualité troublante…
L’apocalypse comme si vous y étiez
En Inde survient un évènement très troublant. Le jeune Hemu Joshi vit sa vie le plus tranquillement possible quand il perd son ombre. Il s’agit d’un évènement incroyable, complètement inattendu, bientôt relayé par les télés du monde entier, surtout que Joshi se met à perdre la mémoire. Il oublie progressivement son passé, ses parents, sans qu’aucun traitement ne soit possible, malgré l’arrivée d’un médecin américain, Zadeh, accompagné d’un patient très particulier, amnésique complet, qui tente de nouer le contact avec Joshi. Mais bientôt les cas se multiplient…
Un homme et une femme, jusqu’à la fin
Pour Ory, la fin du monde commença avec un cerf. A l’aube, il sortit, se rendit à l’orée du bois pour relever le piège à gibier. Suivit le fil du piège, écarta les feuilles, exhuma la cage en métal. Vide.
Lorsque l’épidémie atteint l’Amérique, Ory et sa femme Max fêtent le mariage de leurs amis Paul et Imanuel. Tandis que la fête bat son plein, ils apprennent que Boston est mis en quarantaine tant le nombre de gens perdant leur ombre est exponentiel. Tous essaient de se rassurer, bien sûr les choses vont rentrer dans l’ordre. Sauf que ce n’est pas le cas. L’épidémie s’étend dans tout le pays, qui plonge dans le chaos. Ory et Max restent dans l’hôtel bientôt déserté. Mais quand Max perd son ombre, elle part car elle ne veut être une charge pour Ory. Mais il ne peut vivre sans elle et part à sa recherche. Max, pour résister à la tentation de l’oubli, enregistre ses pensées sur magnétophone. Et elle erre…
Pendant ce temps, l’ancien patient du docteur Zadeh rassemble les survivants à la Nouvelle-Orléans. Et cherche à soigner les sans-ombres.
Un premier roman qui fout une sacrée claque
Sans crier au génie, Le Livre de M est une expérience au niveau lecture. Pour un premier roman, l’auteur fait preuve d’une maîtrise et d’un sens du découpage assez stupéfiant. Il est difficile de rester indifférent devant cette histoire relevant du genre post-apocalyptique, dont Cormac McCarthy a été un des représentants les plus surprenants avec La route. Lire ce livre en pleine épidémie de Covid démontre à quel point la science-fiction est un genre toujours actuel.
Vraie réussite, parfois émouvant, Le Livre de M est un roman clef de notre époque.
Sylvain Bonnet
Peng Sheperd, Le Livre de M, traduit de l’anglais par Anne-Sylvie Homassel, Albin Michel « Imaginaire, juin 2020, 592 pages, 24,90 eur