Saint-Just, l’ange de la mort de la Révolution

Bien né, Louis-Antoine de Saint-Just (1767-1794) est un des intellectuels de la Révolution française, au parcours aussi bref que fulgurant. Ainsi vont les extrémistes ! Sous la haute autorité de Jean Tulard, Noël Simsolo au scénario et Michael Malatini au dessin retracent dans leur album Saint-Just l’ascension et la chute de ce démon de la République.

Une ascension fulgurante

Admirateur de Robespierre, Saint-Just échoue une première fois, du seul fait de la limite d’âge. Trop jeune pour représenter le peuple. Il devient l’année suivante le benjamin de l’Assemblée, à 24 ans. Et aussitôt ses capacités oratoires ainsi que son intransigeance en font une figure centrale.

Il s’illustre dès son élection par une rigueur et un sens du sacrifice, d’autrui. Le peuple doit mourir pour la Patrie et la République, alors en guerre contre une coalition forte. Et il mènera de front deux combats : celui de la guerre, et, avec Robespierre, celui de la condamnation du roi. Il gagnera ces deux combats. Et il deviendra un des piliers du club des Jacobins.

Une idéologie mortifère

[la loi des suspects] qui permet d’arrêter ceux qui, n’ayant rien fait contre la liberté, n’ont rien fait pour elle. Car ce qui constitue une République, c’est la destruction entière de ce qui lui est opposé. (1)

Imaginez la pire dictature communiste du XXe siècle, bornée dans une idéologie stricte et qui manœuvre le peuple avec la plus strict rigueur, violence, intransigeance. Vous aurez une idée de ce feu qui animait — aveuglait… — le si mal nommé Saint-Just, qui fut bourreau de son propre peuple. Il fut terrible avec les soldats, avec le peuple, avec les révolutionnaires pas assez tyranniques selon lui, donc des traitres, car ces gens-là ne pensent qu’en manichéens : compagnons ou ennemis. Lénine citait souvent Robespierre et Saint-Just…

Mais quand la Terreur s’acheva, et qu’on revint à une République plus apaisée et moins sanglante, il accepta de mourir dignement. Il ne se débattit pas quand on l’arrêta pour le conduire à l’échafaud. Il suivit Robespierre, écrasé comme tyran, et finit par la guillotine qu’il avait tant nourri de ses adversaires.

Le destin de Saint-Just est d’être un extrémiste de la République, au point d’y sacrifier toute idée républicaine et toute valeur humaine. Le travail précis et exigeant de cet album est émérite.

Loïc Di Stefano

Noël Simsolo (scénario), Jean Tulard (historien), Michael Malatini (dessin), Saint-Just, Glénat / Fayard, « Ils ont fait l’Histoire », octobre 2022, 56 pages, 14,95 euros

(1) Sur la loi des Suspects, qu’il fait voter, on consultera l’article de la revue Herodote.net.

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