La Putain du Califat, Marie, chrétienne, vendue treize fois par l’Etat islamique

une vie d’objet

Marie voit monter la menace, mais c’est la fille d’un homme d’église apprécié de tous. Alors elle espère. Les voisins chrétiens fuient les uns après les autres, pas sa famille. Puis il ne reste qu’eux. Et les voisins sont moins amicaux et plus envieux. Jusqu’au jour où ils viennent prendre ce qu’ils veulent, des tapis, des meubles. Puis elle.

Parce qu’elle est blonde, et chrétienne, Marie va rendre fou sexuellement les islamistes qui, les uns après les autres, vont en faire leur objet sexuel. Enfermée, maltraitée battue, vendue, louée, prêtée, rien ne lui sera épargnée. C’est un objet. Parmi tant d’autres, butin de guerre. Mais parce que blonde et chrétienne, elle excite encore plus plus la concupiscence des brutes. Qu’importe d’ailleurs leur propre code, manière de guide du bon traitement de son esclave, c’est l’animal seul qui les gouverne. D’ailleurs, ce guide, elle l’apprendra par cœur, pour s’en faire une défense et l’opposer à chaque nouvelle transgression. Mais c’est encore une illusion de croire qu’un sauvage peut être éduqué par un texte de loi, qu’il l’ai ou non rédigé lui-même…

Chacun de ses bourreaux à sa petite histoire. Celui qui l’aime vraiment mais est en conflit avec sa première femme, qu’il finira par abattre. Celui qui l’aime vraiment mais qui ne peut s’empêcher de la battre. L’immonde gros porc, le gentil, celui qui passe et celui qui la loue, à trois frères soldats… C’est un triste portrait des musulmans en guerre que La Putain du Califat dresse aussi. Car on y découvre que certains (venus de France, d’Allemagne…) font commerce de ces femmes comme du bétail… Il n’y a pas que le rustre soldat, il y a le commerçant, il y a le dignitaire qui ne l’est que pour certains privilèges et avoue clairement son manque de foi…

L’Histoire de Marie est bouleversante aussi parce que tous les pêchés du monde lui sont imputés et que sa famille ni sa communauté ne veulent venir à son secours. Elle est souillée, elle doit garder la souillure en elle. Comme si c’était une pécheresse ! Son parcours s’achèvera dans la honte.

L’histoire d’une région qui régresse

Outre la force du témoignage, la dignité de cette femme, c’est l’histoire d’une région qui choit petit à petit que propose La Putain du Califat. La monté de l’intégrisme fait que les anciens voisins, ceux qui ont été accueillis et soignés, trouvent maintenant aux chrétiens tous les maux, et commence à les envier. Il apparaît assez vite que le sort des Juifs, chassés comme des malpropres, va être bientôt celui des chrétiens. Qu’ils soient les médecins et les ingénieurs, qu’importent à ceux qui n’ont que les kalachnilovs pour défendre leur idée du Coran. Quand la barbarie s’empare des hommes, elle en fait une foule brutale et oublieuse.

La Putain du Califat est un document poignant qui montre le sort des chrétiens d’Orient, à la suite des Juifs d’Orient. D’abord voisins et amis, puis — mais à qui la faute si la majorité des intellectuels et industrieux ne sont pas les musulmans ? —, ennemis. L’envie de s’approprier les biens est sans doute une motivation à l’engagement, l’envie de sortir de sa condition paysanne subalterne en détruisant ceux qui jusque là offraient réconfort, amitié et soutien.

La Putain du Califat est un témoignage bouleversant, qui donne le frisson d’autant que ce commerce immonde est légal pour ces criminels qui cachent leurs vices sous la protection de leur religion. De nombreuses scènes sont très difficiles, choquantes, mais pas autant que la réalité qu’elles dévoilent.

Loïc Di Stefano

Sara Daniel et Benoît Kanabus, La Putain du Califat, J’ai lu, février 2022, 224 pages, 7 eur

Sur le sort des chrétiens d’Orient, on lira avec intérêt Sur les fleuves de Babylone, nous pleurions de Sébastien de Courtois (Gallimard, « folio »)

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