Set The Boy Free, jamais assez de Johnny Marr

Connu pour avoir été le guitariste de The The et surtout des Smiths, Johnny Marr se livre avec son autobiographie Set The Boy Free. Johnny Marr est entré dans le panthéon du binaire par la grâce d’un style original, novateur, développé depuis son plus jeune âge. A l’instar d’un autre guitariste avant-gardiste de ces années 80 — Andy Summers de The Police —, il fait voyager la guitare électrique en des territoires éloignés des flamboyances guitare-héroïques habituelles.
Foin de solos éruptifs, de mitraillages aux incandescences distordues à souhait , Marr soigne et peaufine la note, travaille et perfectionne le toucher et produit des textures sonores si personnelles que la légende veut que « personne ne peut jouer comme Johnny Marr ».

This Charming Man

De cette autobiographie, on appréciera l’écriture limpide, concise, et la relative sincérité du propos.
Relative parce que, tout de même, Marr reste très — trop — discret sur certains aspects de sa vie, évoquant essentiellement les banalités toutes relatives attendues : tournées, enregistrements, mode de vie rock’n’roll, etc. N’en faisons cependant pas trop reproche, il eut été malheureux et franchement maladroit de ne pas les évoquer…
Mais, soyons justes, il se livre parfois, surtout sur son enfance d’irlandais déraciné, mais aussi sur le rôle prépondérant qu’il assumera pour les Smiths.
Au-delà de son indispensable présence musicale, c’est lui qui, dans son désir de protéger le groupe et son complice Morrissey, prendra les rênes des affaires du groupe, rôle épuisant et dévoreur de créativité.

Easy Money


Mais Johnny Marr c’est aussi un prolifique musicien de studio et producteur. Des Talking Heads, au mythique Paul McCartney ou encore le compositeur Hans Zimmer, il aura écumé de nombreux studios d’enregistrement, au service de la musique des autres tentant de jongler tant bien que mal avec un emploi du temps rendant difficile les projets personnels, tels que le groupe Electronic , par exemple.
Comme d’autres avant lui — comment ne pas penser à Jimmy Page tant leurs trajectoires peuvent sembler similaires à cet égard — il va user ses cordes et ses doigts sur d’innombrables albums, avant de se focaliser sur sa carrière et sous son seul nom s’il vous plaît.

Get The Message

Sans surprise, cette autobiographie distille anecdotes légères et graves, entre à petit pas dans l’intimité d’un musicien brillant et exigeant, tout en esquissant en filigrane le paysage du rock britannique des années 80.
Plongée nostalgique dans leur boutonneuse adolescence pour les vieux schnocks tels que votre serviteur, ce livre peut également être le moyen de découvrir une époque, et ce rock post-punk qui engendra les groupes les plus passionnants d’alors : The Cure, The Police, Talk Talk, et, bien entendu, les Smiths…

Eric Delzard

Johnny Marr, Set The Boy Free, Le Serpent à Plumes, décembre 2018, 380 pages, 23 eur

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