Alita Battle Angel, James Cameron et le manga : un mariage réussi !

Sortie du mois, Alita Battle angel, produit et écrit par James Cameron, est une réussite.

En attendant la suite d’Avatar annoncée pour décembre 2020, James Cameron nous fait patienter avec Alita, son nouveau film réalisé par Robert Rodriguez, mais écrit et produit par ses soins. En adaptant le manga seinen culte Gunnm, il fait aboutir un projet de 20 ans. Car le manga créée par Yukito Kishirocommencée en 1990, close en 9 tomes en 1995, tapa dans l’œil du réalisateur américain dès 1999.

Et on comprend aisément pourquoi. Encore une fois, un personnage de femme battante ou guerrière est au cœur de l’intrigue. Avec un arrière-plan de vengeance et de rédemption comme storytelling, l’alchimie ne pouvait que prendre.

Bande annonce officielle en vo de la Fox

Gun and Dream

Alita, ou Gally dans le manga, est une cyborg amnésique. Elle a été trouvée et reconstruite par Ido (joué par un Christopher Waltz touchant dans le film), cybernéticien déchu de la cité flottante de Zalem, chasseur de primes ambigu aussi. Des siècles après « la chute », celle-ci plane au-dessus de Iron City, la ville libre et industrieuse qui survit de ses restes. Une cité dépotoir. Au-delà, le Wasteland, est une zone qu’explore parfois les habitants, en quête d’artefacts, souvenirs des guerres passées.

Donc, dans ce décor quasi-cyberpunk, où plane une ville complexe, interlope et cosmopolite à la Blade Runner chère à Ridley Scott, on assiste à la renaissance de la jeune femme. De fillette fragile à guerrière surdouée, maîtresse de l’art du Panzer Kunst. Car Gunnm, nom du manga d’origine, signifie littéralement 銃夢, Ganmu, contraction de Gun and Dream : rêve d’une arme ! Tout un programme !

Swan Song, OST d’Alita par Dua Lipa

Renaissance et rédemption

Dès lors, la quête d’Alita ne cessera plus. Paradoxe, à chaque interaction violente, sa mémoire refait surface. Une adrénaline de la machine qui déverrouille un passé par trop dangereux. Pour elle. Pour les autres. Une guerre passée, un objectif toujours actif ?
Cependant, comme toute ado qui se cherche, c’est en dehors du giron protecteur, en s’encanaillant avec le kid de la cité, le beau et ambigu Hugo (le Yugo du seinen), qu’elle flirtera avec le fil de son destin. Le risque et le dépassement sont ses moteurs.

Ido, son père adoptif, cache lui aussi une double identité. Sous ses dehors ultras protecteurs, il est clinicien cyber le jour, chasseur la nuit. Il en sait évidemment plus qu’il ne le dit. Sur Alita, Zalem et les factions en place. Reliquat moribond mais si puissant d’un monde révolu. Révolu, vraiment ?

Car sur Zalem, un mentor de l’ancien monde, le trop fantomatique Nova dans le film, pressent le risque. Ses sbires et son éminence grise surtout, Vector, seront chargés de régler le problème. Et rien de tel que le jeu ultra violent à la mode à Iron City, le motorball, surgeon direct du Rollerball  de Norman Jewison (oublions définitivement celui de 2002 !). Un jeu où tous les coups sont permis, qui promet au champion de rejoindre Zalem en demi-dieu, riche et adulé…de défier l’Olympe (métaphore évidente du manga).

Alita en mode Panzer Kunst

Accomplissement, sacrifice et chute

Devenue chasseuse à son tour, grâce à ses aptitudes uniques héritées de son passé, l’étrange Panzer Kunst, Alita tente de fédérer les hunters contre les champions de Vector, (Mahershala Ali aux antipodes de son personnage qui lui a valu l’oscar 2019 du meilleur second rôle dans the green book !) âme damnée de Nova et Chiren, (Jennifer Connelly glaciale à souhait !) l’ancienne épouse de Ido, vite déchirée par un conflit de loyauté féroce. Les combats s’enchaînent jusqu’au risque d’un sacrifice dangereux. Mais c’est connu, pour gagner, il faut savoir perdre. Et la mue d’Alita sera encore plus définitive. À son « corps » défendant ! Dans les terres du dehors, le Wasteland, dans un vestige de vaisseau de guerre, elle trouvera une réponse puissante et définitive. Comme une seconde chance, une seconde peau. Mais à quel prix ?

Les ennemis comme Zapan, machine à tuer digne de Robocop (excellent Ed Skrein !), Grewishka son premier bourreau (fusion de Kinuba et Makaku dans le manga), verront alors renaître, tel le phénix la nouvelle entité Alita. Et gare à tous ceux qui risqueraient de se mettre sur sa route !

Mais à ce jeu de qui perd gagne, c’est oublier la nature humaine, la trahison. Consubstantielle de la vérité. Et ses proches ne seront pas en reste. La surprise et le rachat valent-ils le prix à payer…

Zapan et Alita

Une excellente adaptation, une franchise forte en vue ?

Alors certes, les puristes du manga trouveront à redire sur les différences ou les erreurs qui parsèment le scénario. Mais rendons à Cameron, réel maître d’oeuvre ici, beaucoup plus qu’un Rodriguez contraint par la bible du storytelling, les lauriers qu’il mérite. En respectant les strates narratives principales de la version anime de l’OAV de 1993, en suivant scrupuleusement les lignes forces des personnages et du sous-texte des trois premiers tomes de la saga, il nous livre un excellent opus !

Réédition opportune par Glénat du manga original culte : Gunnm last order !

Et malgré une sortie presque ratée aux États-Unis, le film cartonne en asie, en chine particulièrement. Réussissant la gageure de détrôner le blockbuster SF chinois sur ses terres, dont on devrait reparler ici : The Wandering Earth !

Béotiens comme fans de SF et de manga se régaleront donc à suivre la progression chaotique d’Alita vers un révélation/confrontation. Un hiatus entre passé et futur. Car comme le dévoile la scène finale, copié collé des bulles de fin des mangas, clôture et cliffhanger tout à la fois, l’évidence d’une suite saute aux yeux !

Miam ! On en redemande !

Marc olivier Amblard

Alita Fan art par
ManFr0mNowhere

Alita, Battle Angel, réalisé par Christopher Rodriguez, écrit et produit par James Cameron, février 2019, Fox Studio

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