La division Handschar, des SS musulmans
Un chercheur et un domaine méconnu
En Histoire, il y a toujours des domaines méconnus ou surtout des façons nouvelles d’envisager un problème qui renouvellent la recherche. Xavier Bougarel est chercheur au CNRS et s’intéresse à l’histoire des Balkans, plus particulièrement durant la seconde guerre mondiale. Il se propose ici de revenir sur le cas de la 13e division Waffen-SS, la division Handschar, engagée en Yougoslavie (un pays disparu aujourd’hui) durant la seconde guerre mondiale.
Une division si particulière ?
Qu’avait-elle de si particulier cette Division de la Waffen SS ? Elle était constituée (majoritairement) de bosniaques musulmans, avec un encadrement allemand. Leur mission était simple : lutter contre les partisans yougoslaves et les tchetniks serbes. On découvre avec ce livre les préjugés des nazis allemands, finalement pas si défavorables que cela sur les bosniaques, leurs a priori positifs (mais condescendants) sur l’islam. Les nazis ont fait appel au fameux mufti de Jérusalem, Al-husseini, pour favoriser les recrutements.
Mais il n’y a pas foule et au final ces hommes s’engagent surtout pour protéger leurs familles, avoir à manger et dormir sous un toit. L’antisémitisme est présent (et va s’intensifier grâce à la propagande) mais est loin d’être la cause déterminante de leur engagement.
Un enjeu historiographique
La division Handschar est devenue après-guerre un enjeu de mémoire mais c’est surtout les débuts de la guerre en ex-Yougoslavie dans les années 90 qui l’ont amené sur le devant de la scène. Il est prouvé et cet ouvrage y revient, qu’elle a participé à des massacres contre les serbes et surtout à la shoah. Pour autant, cette division n’est qu’un rouage dans la machine SS. Surtout, on découvre que dans les dernières années de la guerre, les frontières devenaient poreuses.
D’anciens SS de cette division passaient par exemple chez les partisans (voire revenaient ensuite chez les SS !) et on a même vu la division Handschar combattre les partisans de Tito en compagnie des… tchetniks. On découvre ainsi que les Balkans n’ont pas vécu le second conflit mondial de la même façon que l’Europe occidentale. Les divisions religieuses, linguistiques ont joué un rôle majeur, annonçant le drame des années 1990.
Cette monographie fait date sur ce sujet spécifique.
Sylvain Bonnet
Xavier Bougarel, La Division Handschar, Passés composés, juin 2020, 437 pages, 24 eur