Brian Wilson, pop star

La passion du rock

Animateur de l’émission « Very Good Trip » sur France Inter, journaliste, Michka Assayas est surtout connu pour avoir publié et dirigé le dictionnaire du Rock chez Robert Laffont, dont la dernière édition en 2014 a connu un franc succès. Chez Le Mot et le reste, il a publié In a Lonely Place, écrits rock en 2013, rassemblant articles et entretiens dont une bonne partie avait été publié dans Les Inrockuptibles. Le court volume Brian Wilson, ancien leader des Beach Boys, paru fin août, en est extrait.

Un génie troublé

Quand Assayas rencontre Brian Wilson en 1992, il s’agit d’un évènement dont il est peut-être aujourd’hui difficile d’imaginer la portée. Wilson a été leader du seul groupe de pop qui a, à un moment, réussi à surpasser les Beatles. Porté par le succès de Surfin’ Usa, le groupe constitué de Brian, de ses frères Carl (quelle voix !) et Dennis, d’Al Jardine et de Mike Love, a suscité aux États-Unis une véritable mania, antérieure à celle des Beatles. Surtout, Brian est un grand compositeur, un « Mozart primitif » comme l’écrit Assayas, tout aussi intuitif que sensible.

Fruit d’une enfance très perturbée, traumatisé par la violence de son père Murry, Brian renonce rapidement aux tournées et se concentre sur le travail en studio. Obsédé par le son créé par Phil Spector (Assayas le raconte très bien) et sa rivalité avec les Beatles (et surtout Paul McCartney), Wilson créée des chefs d’œuvres comme California Girls et surtout l’album Pet Sounds suivi du single Good Vibrations. En 1966, il y a eu un moment de stupeur à Abbey Road en écoutant ces disques : les quatre de Liverpool pouvaient-ils faire mieux ? Ils gagneront le match avec Sergeant Pepper’s lonely heart club band et Brian Wilson, devenu fou, craque pendant l’enregistrement du fameux Smile : il sombre alors dans un état dépressif qui empirera dans les années 70.

Un artiste sous contrôle

L’homme que rencontre Michka Assayas en 1992 est sous le contrôle lointain mais certain d’Eugene Landry. A la fois psychiatre et gourou, il a réussi à sortir Brian Wilson de l’hébétude au milieu des années 70, à la demande de la famille. Wilson a réussi à enregistrer un album solo en 1987, plutôt réussi. Mais il a échoué à obtenir un succès commercial tandis que les Beach Boys triomphaient avec Kokomo (vous vous rappelez la chanson du film Cocktail avec Tom Cruise ?).

La bonne surprise de l’entretien obtenu par Assayas est que Brian Wilson se montre très disert. Il a envie de parler, de se livrer, malgré quelques réticences. Il parle de son groupe, de Spector, avec une liberté de ton appréciable. Plus tard, il se délivrera de Landry et terminera Smile (enfin, presque). On laisse le lecteur sur cette phrase magnifique captée par Assayas. Elle justifie pour tout amateur de musique de lire cet ouvrage :

Je crois que si vous avez une obsession monomaniaque pour la musique, comme c’était mon cas, et comme c’est apparemment le vôtre, vous recueillez la musique en vous et vous continuez jusqu’à ce qu’elle ne vous quitte plus jamais. C’est plus facile à dire qu’à faire, mais c’est faisable. Vous pouvez l’emporter avec vous, vous promener avec… 

Sylvain Bonnet

Michka Assayas, Brian Wilson, Le mot et le reste, août 2020, 84 pages, 10 eur

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