Albin Chalandon, l’homme qui voulait être utile à la France

Le grand public d’aujourd’hui connaît peu Albin Chalandon, ministre à plusieurs reprises et personnalité éminente de la droite française, décédé en 2020. L’ambition de Pierre Manenti, haut-fonctionnaire et auteur d’une Histoire du gaullisme social (Perrin, 2021), est de nous faire découvrir une personnalité originale et qui sort parfois des sentiers battus.

De la Résistance à la politique

Issu d’une famille bourgeoise, Albin Chalandon s’engage dans la Résistance et combat les allemands. Courageux, il doit procéder à l’exécution d’un milicien et de son fils, évènement qui l’a hanté toute sa vie, comme le découvrira bien plus tard sa deuxième épouse Catherine Nay. Chalandon intègre en tout cas après sa réussite au concours l’inspection générale des finances et participe à plusieurs cabinets ministériels sous la IV république, en particulier ceux de Léon Blum et de Paul Ramadier. Parallèlement, il s’engage au RPF, au service du général de Gaulle. Il bifurque ensuite vers la banque, gagne de l’argent et épouse la princesse Salomé Murat. Le retour du général de Gaulle en 1958 le pousse à s’engager à l’UNR, le nouveau mouvement gaulliste. Il soutient la politique algérienne gaullienne dans tous ses méandres et se montre un adversaire coriace des partisans de l’Algérie française puis de l’OAS…

Les scandales et l’action

Albin Chalandon se fait élire (puis réélire) député avant de devenir ministre du général de Gaulle et de Pompidou. Politiquement, il est plutôt libéral en économie, sous le signe toutefois du pragmatisme. Il se fait le chantre de la maison individuelle (les fameuses « Chalandonnettes » qu’on lui reprochera plus tard) et se fait le promoteur du développement des autoroutes, qu’il fait construire dans les années 70. Mais Chalandon, homme riche et talentueux, suscite de la jalousie et est parfois maladroit. On lui reproche d’être trop près des scandales et de mal choisir ses collaborateurs (l’affaire Aranda). Il s’éloigne (un peu) de la politique et est nommé président d’Elf Aquitaine par Giscard, confirmé par Mitterrand. Là, nouveau scandale des « avions renifleurs, une escroquerie dont le responsable est son prédécesseur Pierre Guillaumat (et qui a valu au lecteur quelques éclats de rires). Chalandon revient en politique auprès de Jacques Chirac et devient garde des sceaux. Il ne réussit pas à réformer le code de la nationalité, fait par contre construire de nouvelles prisons. Puis c’est la retraite définitive après 1988.

Que retenir de cet itinéraire ? Voilà un homme qui a pris des risques, qui a voulu faire des choses, parfois à contre-courant. Chalandon est une figure attachante, marqué par la Résistance. Un homme au fond sympathique que Pierre Manenti a réussi à faire revivre avec cette biographie.

Sylvain Bonnet

Pierre Manenti, Albin Chalandon, préface de Catherine Nay, Perrin, avril 2023, 400 pages, 24 euros

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