France-Vatican, un passé très présent

Auteur de plusieurs ouvrages et biographies – on lui doit par exemple une somme sur Gorbatchev (Perrin, 2014) -, très intéressé par l’histoire des papes et de l’église catholique, Bernard Lecomte livre avec France-Vatican (sous-titré “deux siècles de guerre secrète”) une étude des relations entre Paris et le Vatican, de la Révolution à nos jours.

Une relation contrastée

Disons-le tout de suite : je pense qu’il est abusif de parler de deux siècles de guerre, secrète ou non, entre la France et l’église. La Révolution a été un moment difficile et un pape, Pie VI, est mort à Valence, prisonnier de la République. Certes, Pie VII a eu à affronter Napoléon. Mais l’église catholique dirigée par le Vatican a eu aussi des phases plus apaisées dans son rapport à la France : la période de la Restauration, de la Monarchie de Juillet par exemple ou le moment de la République gaullienne (il est vrai que de Gaulle avait exigé une épuration de l’église en 1944-45 qui fut mené adroitement avec le nonce Roncalli). Et puis il y a un troisième acteur, bien analysé par Bernard Lecomte : l’église de France elle-même, rétive parfois à suivre le Vatican, comme le démontre, dans des circonstances différentes, la mise à l’index de l’action française ou l’interdiction des prêtres ouvriers.

Une religion majoritaire devenue minoritaire

En fait, la vie de l’église catholique en France est marquée par le recul de ses positions, constant depuis deux siècles. La Révolution a marqué un premier recul de la pratique, l’école laïque et la séparation de l’église et de l’État (mais pas en Alsace-Moselle) ont entériné la sécularisation. Surtout les années 1960-1980 ont vu plusieurs crises se superposer : chute de l’assistance à la messe, baisse des vocations à la prêtrise, chute des baptêmes et des mariages, généralisation du divorce, légalisation de l’avortement, mariage pour tous… Si la France reste marquée par le catholicisme, si les catholiques sont courtisés au moment de chaque élection, ils sont désormais une minorité dans une société sécularisée. Rome et le pape François regardent ailleurs, vers le Sud global par exemple (appelé le tiers-monde autrefois) et la fille aînée de l’église est un vieux souvenir. Relation tumultueuse donc mais marqué aujourd’hui par une indifférence croissante.

Sylvain Bonnet

Bernard Lecomte, France-Vatican, Perrin, mars 2024, 448 pages, 24 euros

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