Le Nouveau Barnum d’Alessandro Baricco

Alessandro Baricco est un Italien vrai. Entendons par là qu’il aime la vie, qu’il aime les gens, qu’il aime le monde. Qu’il s’agisse de sport ou de musique, de littérature ou de peinture, de Venise ou de Manhattan, de rugby ou de cinéma, tout lui est étonnement, tout lui est bonheur. Voilà donc un antidote recommandable, en ces temps de morosité ambiante. Alessandro Baricco est à la fois journaliste, romancier, essayiste, critique, et sa plume est fort connue en Italie. Pendant plus de quinze ans, de 1990 à 2016, il a publié de nombreux reportages dans les journaux, articles aujourd’hui réunis dans un gros bouquin intitulé Le Nouveau Barnum. Pourquoi Barnum ? Parce que le monde lui donne l’impression « d’être un joyeux manège de pistoléros et d’illusionnistes ». Voilà pour le cirque !

un voyageur curieux de tout

Pendant toutes ces années, notre homme a voyagé. A Chicago, il applaudit Michael Jordan et son équipe de basket ; à Pampelune, il se passionne pour l’encierro, et nous en donne un compte rendu irrésistible ; à Berlin, il écoute religieusement Claudio Abbado diriger le Philarmonique ; à Los Angeles, il assiste ahuri à une Convention Démocrate. Et ainsi de suite, avec un total de soixante chroniques, qui passent sans transition de Jen Paul 2 à Vargas Llosa, de la corrida au Festival d’Avignon (« où se tient en juillet la plus grande orgie théâtrale du monde »), de Cécilia Bartoli à Houellebecq et beaucoup d’autres. 

Alessandra Baricco est curieux de tout. Il se plait au spectacle de ses contemporains, et donne du plaisir à le raconter, autant qu’il en prend à le faire partager. Son couplet sur « le cirque des subventions publiques en Italie », est aussi drôle que sa rencontre inopinée avec Meryl Streep « la plus grande de tous les temps », ou sa critique de « La veuve joyeuse, qui n’est pas toujours joyeuse… ». Enfin, il excelle aussi comme critique d’art, ce qui nous vaut cette jolie phrase « Le tableau de Léonard de Vinci ne représente pas la Cène, il EST la Cène ». 

et surtout du football

Mais en bon italien, Baricco aime par-dessus tout le football. Il peut écrire trois cents pages sur un match, surtout s’il oppose l’Allemagne à l’Italie, s’émerveiller pour les feintes de Muller, débordement, extérieur du pied, et autre virtuosité, qu’il commente avec autant de lyrisme que d’amusement. Ces textes sur le football vont forcément ravir les amateurs du ballon rond. Ceux qui préfèrent la musique se régaleront de ses comptes rendus à la Fenice ou à Salzbourg, « qui est à l’opéra ce que Wimbledon est au tennis ». Tout est dit. 

Alessandro Baricco est un joyeux voyageur qui regarde le monde avec des yeux d’enfant. Voyager avec lui à travers Le Nouveau Barnum est une friandise de fin gourmet. 

Didier Ters

Alessandro Baricco, Le Nouveau Barnum, traduit de l’italien par Vincent Raynaud, Gallimard, septembre 2021, 460 pages, 24 eur

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