Pink Floyd et Syd Barrett, la croisée des destins

Une enquête sur un groupe mythique

Journaliste pour RMC Sport, Alexandre Higounet a déjà consacré un ouvrage à Pink Floyd, Which one’s pink ? en 2018. Contrairement aux Beatles où à Led Zeppelin, le Floyd n’a en effet pas de leader jusqu’à l’émergence de Roger Waters au mitan des années 70. Mais il y en eut un pourtant, au tout début du groupe : Syd Barrett, ami d’enfance de Roger Waters et David Gilmour, figure centrale du psychédélisme londonien. La carrière météorique de Barrett en a fasciné plus d’un (citons Étienne Daho et David Bowie). Alexandre Higounet propose avec Pink Floyd et Syd Barrett, la croisée des destins de relire les trajectoires entrelacées de Barrett et de Pink Floyd.

Un « crime fondateur » ?

Rappelons les faits bien relatés ici. Après avoir composé la majeure partie de l’excellent Piper At The Gates Of Dawn et enregistré des singles à succès comme See Emily Play, Syd Barrett sombre. Durant le second semestre de 1967, l’abus de drogue, surtout le LSD, détruit l’équilibre mental d’un jeune homme peut-être déjà fragile. Il se révèle incapable de gérer le succès, ne joue plus sur scène et se réfugie dans la catatonie. Pour le doubler sur scène, ses trois camarades engagent David Gilmour mais la formule à cinq ne fonctionne pas.

Alors début 68, un jour de janvier, Waters décide de ne pas aller chercher Barrett pour les répétitions. Ce dernier s’en rend-il compte ? Il semble que oui, d’après les témoignages car il a des moments de lucidité. Si le départ de Barrett va pousser le groupe à s’inventer une nouvelle identité musicale, qui les mènera à enregistrer des chefs d’œuvre comme Dark Side of The Moon ou The Wall, ils n’oublieront jamais leur fondateur. Waters et Gilmour surtout se sentiront coupables, au point de travailler sur ses albums solos. Mais l’histoire ne s’arrête pas là bien sûr.  

Un absent obsédant

Beaucoup de chansons du Floyd s’adressent à Barrett. Songeons à If en 1970, à Brain Damage et bien sûr à Shine on You Crazy Diamond. Alexandre Higounet propose ici de relire leur carrière à l’aune de cette absence. Bien des textes écrits par Waters s’adressent à Barrett. Sur The Wall, que cela soit le disque ou dans le film, bien des épisodes décrits retracent la vie de Syd et son effondrement, croisés avec des souvenirs de Waters. Même des morceaux comme Echoes ou Atom Heart Mother semblent vouloir des paysages sonores inspirés à la fois par l’état mental de Barrett et les sentiments du groupe envers lui.

Quant à David Gilmour, il a toujours pris soin à ce que les royalties revenant à Syd soient payées. Il prenait de ses nouvelles tout en acceptant le souhait de la famille qu’aucun membre de son ancien groupe ne reprenne contact avec lui. En 2005, lors du live 8, le Floyd reconstitué lui dédie une dernière fois, par la voix de Waters réconcilié avec Gilmour, la chanson Wish You Were Here.

Pour Higounet, c’est l’effondrement mental de Barrett qui a forgé Pink Floyd. Passionnant.    

Sylvain Bonnet

Alexandre Higounet, Pink Floyd & Syd Barrett, Le mot et le reste, février 2021, 204 pages, 19 eur

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