Le corps de la reine, le roi ne peut être une femme

Les corps royaux à travers l’histoire

On a connu le professeur Stanis Perez à travers La Santé de Louis XIV (champ vallon, 2007) et surtout Le Corps du roi (Perrin, 2018). A travers ces deux ouvrages, il optait pour une analyse croisant médecine et idéologie royale, dans la lignée des travaux fondateurs d’Ernst Kantorowicz et sa théorie des deux corps du roi. Après s’être intéressé au corps du roi, viril et incarnant le royaume, Stanis Perez se tourne vers Le Corps de la reine, et se propose ici de relire près de 800 ans d’histoire.

Beauté et maternité

On part donc de la figure la plus ancienne, celle d’Isabelle de Hainaut épouse de Philippe-Auguste, jusqu’à celle de Joséphine de Beauharnais. Stanis Perez a lu et décrypté avec attention les textes et inscriptions relatives à la figure de la reine. Les romans courtois aident aussi à dégager une image de la beauté royale, blonde à la peau diaphane, fidèle à son roi bien sûr (même si bien des nobles se dévouent pour elle par amour).

Et puis, surtout même, la reine doit être féconde et c’est l’enjeu principal : elles doivent prendre soin d’elle, éviter tant que possible les voyages étant enceinte (il y a des cas d’accidents et de fausse-couches). A travers elle, c’est la continuité de l’Etat qui est en jeu. Elle doit donc donner des héritiers au roi mais peut-elle participer au pouvoir ?

Le pouvoir et la Reine

On connait la loi salique, construction du XIVe siècle qui exclut les femmes de la succession royale pour empêcher le roi d’Angleterre de monter sur le trône de France. Reste que c’est dans leur ventre que grandit le futur roi, elles participent donc de la consolidation et de la légitimité du pouvoir royal. De plus, l’histoire compte de nombreuses régentes, de Blanche de Castille à Catherine de Médicis et bien sûr Anne d’Autriche.

Pour Stanis Perez, la construction idéologique de la loi salique et la règle de primogéniture masculine a « piégé » la monarchie française. Il y eut des régentes mais elles exercent le pouvoir au nom du Roi leur fils. Le roi ne peut être une femme donc pas d’Élisabeth Ire comme en Angleterre. La Reine est sacralisée mais n’a pas de pouvoir propre.

Très bonne étude qui renouvelle notre vision des reines de France.

Sylvain Bonnet

Stanis Perez, Le Corps de la reine, août 2019, Perrin, 480 pages, 25 eur

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