Histoire du 1er régiment étranger de parachutistes, des soldats broyés par l’histoire

On se rappelle d’Hélie Denoix de Saint Marc, de son procès, de sa silhouette de héros et de son témoignage. Résistant, déporté, il commande temporairement le premier régiment étranger de parachutistes en avril 1961, au moment du putsch d’Alger. Lui et son régiment vont soutenir les généraux révoltés. Ce sera un échec, le régiment sera dissous par le général de Gaulle. André-Paul Comor, spécialiste de la Légion étrangère, dont le premier REP est un enfant, livre ici l’histoire de ces hommes et de leurs combats en Indochine et en Algérie.

Une troupe d’élite

A l’origine, ce sont des hommes de la légion qu’on forme en bataillon au camp de Sidi Bel Abbès. Entraînés au parachutisme, ce sont des étrangers, souvent des allemands (on est après 1945) et ils sont envoyés en Indochine où une guerre qui ne dit pas son nom commence. Là, ils se révèlent de féroces combattants, entraînés à la survie mais le bataillon est étrillé lors de la bataille de la R.C (route coloniale) 4 en 1950. Reformé, il est envoyé à Dîen Bîen Phu. Et il est une fois de plus anéanti, même si ses membres se couvrent de gloire… Mais à quoi sert la gloire quand on perd et qu’on ne sent pas soutenu par les politiques. Le BEP quitte l’Indochine et devient le REP : voici maintenant ce régiment engagé en Algérie.

Dans les tourments de la guerre d’Algérie

Cet ouvrage, parfois hagiographique, décrit très bien les combats du premier REP en Algérie, particulièrement contre les maquis lors de l’application du plan Challe en 1959-60 qui détruit La majeure partie des capacités militaires des rebelles du FLN. L’auteur excelle à peindre ces hommes, officiers et soldats, qui se mettent à douter du gouvernement français (l’effet sur le moral de l’expédition de Suez, à laquelle participe le 1ER REP, est désastreux) et bientôt du général de Gaulle qui ne cache pas, après le discours de septembre 1959 sur l’autodétermination, sa volonté de trouver une issue politique par la négociation avec les indépendantistes algériens. Les soldats du 1er REP ne sont pas des têtes brûlées, ils ont simplement leur vision de l’honneur, le leur et celui de la France, qui diffère de plus en plus de celle de de Gaulle. Même s’ils perçoivent la misère et le sous-développement des populations rurales algériennes et savent que la France y a sa responsabilité, ils ne peuvent comprendre le choix de l’indépendance.

Cette Histoire du 1er régiment étranger de parachutistes d’André-Paul Conor est au fond tragique. Notre époque peut-elle comprendre ces hommes ?

Sylvain Bonnet

André-Paul Comor, Histoire du 1er régiment étranger de parachutistes, Perrin, novembre 2023, 480 pages, 22 euros

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