Les Agents de Dreamland, enfin du fantastique qui fait peur !

Une nouvelle signature  

Peu connue en France, Caitlin R. Kiernan est une paléontologue irlandaise, surtout connue outre-Atlantique et outre-manche pour La Fille qui se noie (Eclipse, 2014) pour lequel elle a reçu les prix James Tiptree et Bram Stoker. Les éditions Le Bélial ont sélectionné pour leur collection « une heure lumière » le court roman Les Agents de Dreamland qui vient juste de paraître. C’est plein d’espoir donc qu’on commence la lecture de ce texte.  

Dossier secret, avenir inavoué  

Voici le décor : nous sommes jeudi soir et le Signaleur, assis à fumer avec un Dr Pepper Light éventé à la main, s’autorise à pousser un faible soupir de soulagement tandis que le crépuscule tant attendu, s’écrase sur le désert. 

Tandis que la sonde New Horizons s’approche de Pluton, des évènements étranges se produisent sur Terre. Les fédéraux ont retrouvé les cadavres des membres d’une secte atrocement… changés, pourris de l’intérieur par une sorte de mucus. C’est le Signaleur qui les a trouvés. C’est un vieux de la vieille, habitué à l’horreur. Il a rendez-vous avec Immacolata Sexton, une drôle de femme dont la conscience dépasse les limites habituelles du temps. Elle sait qu’une invasion est en cours en provenance de Yuggoth, que des artistes l’ont rêvé, chanté même (comme les Beatles). Le Signaleur peut-il encore faire quelque chose ?  

Black Bird singing in the dead of night… 

Les Beatles, double blanc

Une grande réussite 

Les Agents de Dreamland constitue une excellente surprise. Le récit se déroule à plusieurs époques, donc déconstruit et pourtant d’une logique implacable. Implacable car lovecraftienne. Chez Lovecraft, que Kiernan cite à foison (l’inspiration du texte se trouve dans Les fungi de Yuggoth et Celui qui chuchotait dans les ténèbres), on ne peut que retarder l’inévitable. Ici, c’est la même chose : Kiernan a réussi à donner à chaque étape de son écrit cette sensation d’inéluctabilité. Elle a donc réussi en un sens à se poser comme héritière de Lovecraft. Ce n’est pas rien. Notons enfin que ce texte est servi par une excellente traduction de Mélanie Fazi, également auteure de fantastique à ses heures.

A ce stade, on a donc très envie de lire d’autres textes de Caitlin R. Kiernan : bravo madame !    

Sylvain Bonnet  

Caitlin R. Kiernan, Les Agents de Dreamland, traduit de l’anglais par Mélanie Fazi, illustration de couverture d’Aurélien Police, Le Bélial, « une heure-Lumière », août 2020, 128 pages, 9,90 eur

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