Le triomphant, face à la bête

Un auteur atypique

On a connu Clément Milian avec Planète vide (Gallimard, 2016), qui retraçait l’errance dans la grande ville d’un gamin, ou comment voir la noirceur (et aussi des beautés éparses) à travers les yeux d’un enfant. Il a suivi Aurélien Masson, ancien directeur de la Série noire, aux Arènes et le voici de retour avec Le Triomphant, un roman décrit par certains comme violent, âpre se passant en pleine guerre de cent ans.

Les cinq contre la bête

En plein XIVe siècle, le royaume de France est déchiré par la guerre entre français et anglais. Lors des batailles, un monstre hache les corps et tue sans distinction, puis viole les femmes et massacre les enfants. On l’appelle « la Bête ». Cinq soldats quatre français et un anglais, ont décidé de la tuer et se lancent dans une (en)quête qui les mène au bout d’eux-mêmes :

Dans la mêlée, elle était Moïse face à la mer ouverte. / Satan armait son bras. / Pour la première fois de leur vie, Aloys, Engelier, Païen, Bertrand et l’anglais qu’ils appelaient Godon, ne se battaient pas pour l’argent, ni pour survivre. / La bête était responsable de tout. »

 Ils la suivent. Quand la bête entre dans une forêt en flammes, ils la suivent aussi. Ils veulent sa peau. Ils ne savent pas qu’eux sont suivis par la jeune Diane, une orpheline qui a perdu sa famille à cause de la bête même si elle pense qu’ils sont les coupables. Elle ne cherche pas à se venger, juste à survivre. Le sang va bientôt couler.

Un tour de force

Qu’est-ce que Le Triomphant ? plus le roman avance, plus on se demande si les personnages ne sont pas devant un monstre, une chose qui se nourrit de la violence et des guerres passées et à venir (à un moment, la bête a des visions des combats de l’avenir. Le texte frappe par sa concision. Ce sont des phrases courtes, des descriptions aussi sommaires que des coups de haches, conçues pour frapper le lecteur : de ce point de vue, Le Triomphant est une vraie réussite, un choc même. On regrettera des personnages un peu schématiques, peut-être aussi la conséquence du style adopté par l’auteur.

C’est en tout cas un texte inclassable qu’on recommande, tant aux amateurs de roman noir que de fantasy.

Sylvain Bonnet

Clément Milian, Le Triomphant, Les arènes, « Equinox », mai 2019, 272 pages, 12,90 eur

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