Combattre la pandémie, choléra 1832

De l’histoire militaire au choléra

Historien reconnu, Nicolas Cadet a soutenu sa thèse à l’EHESS sous la direction de Stéphane Audoin-Rouzeau, spécialiste de la grande guerre, pour laquelle il a reçu le prix d’histoire militaire du CEHD (Centres d’études d’histoire de la Défense) en 2009. Auteur d’Honneur et violences de guerre au temps de Napoléon, la campagne de Calabre (Vendémiaire, 2015). Avec Combattre la pandémie, il change complètement de registre en voulant analyser la façon dont l’État et la médecine ont réagi face à la pandémie de choléra au XIXe siècle.

Quand l’histoire entre en percussion avec le présent

L’auteur et bien vite nous-mêmes avons forcément en tête la récente pandémie de Covid qui nous a rappelé notre vulnérabilité. Le choléra fait alors plus de 100 000 morts dans la décennie 1830, avec des résurgences tout au long du siècle. C’est une maladie dû au vibrion, qui se développe dans les eaux usées et profite d’une hygiène déplorable. C’est à la fin du XIXe siècle qu’il sera isolé et identifié. Entre-temps, la médecine ne peut que traiter les effets. En Sarthe, département analysé par Nicolas Cadet, les pouvoirs publics ont la chance d’être moins touchés qu’ailleurs, du moins au début, mais ont peu de médecins. On construit en urgence, on dégage des places dans les hôpitaux et les hospices. Et ce sont les pauvres qui sont touchés le plus, ce qui alimente bien des fantasmes.

Une pandémie politique

La monarchie de Juillet est un régime « jeune », né de la Révolution de 1830, qui doit faire face à la double opposition des légitimistes et des républicains. Et certains opposant tentent d’instrumentaliser le choléra pour essayer de le renverser : notons que la chevauchée de la duchesse de Berry est contemporaine de la pandémie. Nicolas Cadet démontre bien que le choléra fournit l’occasion au régime de renforcer son contrôle sur les populations, par exemple sur les ouvriers via le livret instauré par Napoléon pour contrôler leurs déplacements. Au final, le régime en sort renforcé, Nicolas Cadet rejoignant à cette occasion les thèses de Michel Foucault sur le « biopouvoir ».

Il faut lire Combattre la pandémie de Nicolas Cadet pour réfléchir.

Sylvain Bonnet

Nicolas Cadet, Combattre la pandémie, Vendémiaire, août 2022, 420 pages, 25 euros

Laisser un commentaire

%d blogueurs aiment cette page :