« Criminal, tome 7 » : polar noir, fantasy et kung-fu

Après Fondu au noir et Kill or be Killed, Ed Brubaker et Sean Phillips reviennent en librairie pour écrire une nouvelle page de la série Criminal. Ce récit complet totalement indépendant de la série principale vient confirmer l’immense talents des 2 artistes, le temps d’un polar en forme d’hommage à la Marvel des années 70…

 

 

1976. Après une attaque au fourgon blindé ayant mal tourné, le gangster Teeg Lawless tire ses derniers jours en prison. Mais son boss, M. Hyde, n’aime guère l’échec : il a mis un contrat sur sa tête. Il reste deux semaines à Teeg pour faire profil bas avant retrouver sa liberté. Deux semaines où il va vivre l’enfer…

 

 

Une histoire indépendante

Mine de rien, en quelques mois, le duo Ed Brubaker-Sean Phillips vient de nous livrer Fondu au noir et Kill or be killed, deux comics racés, deux joyaux noirs qu’on vous a évidemment conseillés ici même. On peut espérer que le succès ait été au rendez-vous puisque voici un nouveau polar noir comme on les aime. Et oubliez que cet album est un tome 7. En réalité, il réunit deux épisodes spéciaux publiés aux États-Unis en marge de la série Criminal. C’est bien simple : même si comme moi vous n’avez jamais lu Criminal, vous pouvez vous lancer dans ce tome totalement indépendant de la série.

 

 

Du polar, de la fantasy et du kung-fu !

Ed Brubaker a l’habitude d’abuser des flash-backs. Pour ma part, si Fatale et Velvet, deux succès d’Ed Brubaker, me sont tombés des mains, c’est à cause de l’utilisation à outrance de ces retours en arrière (parfois même emboîtés les uns dans les autres). À mon grand soulagement, les épisodes réunis ici évitent cet écueil. Au lieu des flash-backs, Ed Brubaker nous offre un bel hommage aux comics Marvel des années 70. En prison, Teeg Lawless lit Savage, un pastiche de Conan imaginé par les auteurs. Plus loin, son fils se passionne pour Deadly Hands, référence aux comics de kung-fu de la Maison des Idées. Pour appuyer l’hommage, Sean Phillips glisse quelques pages de ces vieilles histoires dans Criminal, avec les codes et les clichés parodiés. Le Sauvage Zangar rappelle évidemment un certain cimmérien de Robert E. Howard, et Fang le loup-garou kung-fu le célèbre Deadly Hands of Kung Fu. Savoureux.

 

 

La passion des comics

Dans la seconde histoire de Criminal, tome 7, Ed Brubaker s’attarde longuement sur le fils Lawless pour évoquer sa passion pour les comics et ses premiers émois amoureux. Sans jamais oublié qu’il mène un polar, on découvre un Ed Brubaker sensible et touchant, évoquant les débuts d’une adolescence difficile. Gabby la lectrice solitaire et Walter le libraire : autant de portraits aussi fugaces que réussis et émouvants.

 

 

Stéphane Le Troëdec

 

 

Ed Brubaker (scénario), Sean Phillips (dessin), Criminal, tome 7 – Au mauvais endroit…, traduit de l’anglais par Alex Nikolavitch, Delcourt, « Contrebande », mars 2018, 112 pages, 14,95 euros