Rose à l’île, voyage initiatique du Québec
Depuis 2011, nous prenons plaisir à découvrir la saga de Paul composée par Michel Rabagliati. Le neuvièmème épisode de la série a d’ailleurs reçu en 2021 le fauve « Prix de la série » à Angoulême. Cette fois-ci, l’auteur qui fait rayonner la culture québécoise, adopte un nouveau format de bd qui nous inspire particulièrement : Rose à l’île est un roman illustré.
Retour à la vie authentique
Arrgh ! J’ai chié dans le truc sans mettre le filtre de papier, et là… fuck de #%@*!!…
Paul part cet été en vacances avec sa fille, il a besoin de se reposer après des épisodes douloureux. Perte de ses parents, séparé de sa femme, il est en pleine dépression. Rien de mieux qu’un séjour sur l’île Verte, au milieu du St Laurent, coin isolé du Québec comme il en existe tant.
Ce charmant chalet en bois au milieu du lac enchanteur ne laisse présager que repos et déconnexion. Seulement si on fait abstraction du confort rudimentaire.
Sa fille remarque très vite que le réseau n’existe pas et le wifi encore moins ! Pour une jeune femme de 23 ans c’est l’enfer sur terre… mais elle va déconnecter.
Le bonheur est simple, trouver un spot au bord de l’eau, un bon bouquin de Houellebecq pour l’un, le musée du squelette pour l’autre. Le plaisir de laisser filer le temps, de se remémorer les souvenirs même s’ils sont douloureux et faire des rencontres pour s’évader.
Un nouveau chapitre pour Michel & Paul
Là ! des baleines, là ! Juste en bas Regarde p’pa ! Shit on entend leur souffle.
Paul, c’est notre Martine française ! Depuis Paul à la campagne en 2011, s’en est suivi Paul en appart, Paul dans le métro, Paul à la pêche…
Pour celui qui n’aime pas travailler dans les petites cases de la bd conventionnelle, il s’en affranchit à nouveau dans ce bel exercice. Marier le dessin et la narration en choisissant un format compact du semi-poche qui le rapproche encore davantage à un roman. Et il est probable que ses romans illustrés éclosent dans la vie personnelle de l’auteur, c’est en tout cas un nouveau départ dans la série des Paul.
Volontairement ce mode d’expression s’est imposé pour ce récit particulier pour l’auteur. Et au-delà de le traiter comme un roman illustré, il a souhaité conserver l’identité de l’île. A la fois sauvage et naturelle, pas de cases pour enfermer les scènes, sans mise en couleur, ni encrage. La pureté et la simplicité du crayon comme seul composant. Ce n’est pas pour autant que le dessin est dépouillé, au contraire il est précis et détaillé, moins aseptisé que le dessin numérique habituel, seule exception Paul et Rose qui conservent leur trait simples et caractéristiques.
Un vent frais coule dans ce si beau Rose à l’île, il ne se passe rien de particulier si ce n’est les rencontres, les balades, les découvertes… la vie simple en définitive. La rencontre d’un père et de sa fille qui apprennent à se connaître.
Xavier de La Verrie
Michel Rabagliati, Rose à l’île, La Pastèque, octobre 2023, 80 pages, 25 euros