Rien ne passe, tout s’oublie, l’observateur de notre temps
Emmanuel de Waresquiel, spécialiste des XVIIIe et XIXe siècles français, est devenu un des meilleurs historiens français. Erudit, Waresquiel aime hanter et ruminer les sources avant d’écrire et ses biographies de Talleyrand, Fouché ou madame du Barry le montrent bien. Il vient de publier Rien ne passe, tout s’oublie, compilation de textes soit écrits pour la revue Historia, soit inédits, où il observe notre époque.
Tout y passe !

Waresquiel a quelque chose d’un moraliste dans ces textes courts et pétillants de malice. Il consacre ainsi un texte étonnant et émouvant sur l’impact de la disparition de Jean-Paul Belmondo que tous ou presque ont aimé, ou encore sur Tintin et Milou en concluant que le plus humain des deux, c’est Milou (beaucoup apprécieront) ! Il s’étonne aussi que le plus grand débat politique des dernières années ait porté sur les retraites, signe que nos sociétés ne vont pas très bien et négligent d’autres sujets (et il y avait quelque chose de troublant à voir des jeunes de 18 ans manifester pour leurs retraites…). Il nous parle aussi des chiens, de la reine d’Angleterre, de livres. Et puis bien sûr, de Talleyrand.
Et il y a des choses qui ne changent pas
Emmanuel de Waresquiel observe les évènements. Il voit ainsi débuter et s’approfondir la guerre en Ukraine. Il note la singulière passion française envers la Russie. Elle débute avec les philosophes si prompts à vanter la sagesse de Catherine II, une autocrate qui pratique le droit de conquête et envahit ses voisins. Cela se poursuit avec Napoléon et ses illusions envers Alexandre Ier, l’alliance franco-russe de 1893, la singulière passion communiste pour se terminer avec les sympathies du RN et de LFI envers Poutine. Il faut en revenir à Talleyrand qui voyait dans la politique étrangère de la Russie un facteur continuel de déstabilisation du continent, Moscou cherchant toujours à envahir et occuper ses voisins, peut-être par complexe obsidional. En tout cas lisons Emmanuel de Waresquiel et méditions avec lui sur ce temps qui passe.
Sylvain Bonnet
Emmanuel de Waresquiel, Rien ne passe, tout s’oublie, Tallandier, avril 2025, pages, 20,90 euros