Un rêve d’Europe, le voyage de Fabian Göranson

Le parti pris du bleu est certainement assumé dans Un rêve d’Europe de Fabian Göranson comme la couleur du drapeau européen. Mais au-delà de cette symbolique, le bleu est une des couleurs les plus complexes mais surtout la couleur la plus aimée dans le monde. Elle fait référence à la mer et au ciel et par extension au voyage, thème de ce roman graphique. Le bleu est aussi lié aux rêves et à la sagesse, nous allons voir vers quelle signification Fabian Göranson a-t-il voulu tendre.

Les routiers se content les histoires rapportées de l’asphalte, bédouins d’une Europe consumériste de leurs caravanes rugissantes.

Un road movie politique et anticonformiste

Fabian Göranson, auteur de BD suédois, est poussé par sa femme à quitter la maison conjugale. Ainsi commence le périple d’un mois qu’i fait avec son ami Daniel Berg autour de l’Europe pendant l’été 2017.

Une envie forte de s’évader, de parcourir cette Europe dont il a une perception négative et qu’il veut retranscrire au travers des rencontres — qu’il programme ou qu’il fera au hasard de leur pèlerinage. L’Europe va-t-elle s’abimer sous le poids de la crise migratoire, du chômage, de la montée des extrêmes et des sentiments xénophobes ?

Sa quête va lui permettre de repartir vers des lieux de son enfance ou de villégiature, des lieux souvent malmenés soit par ses souvenirs soit par l’implacable transformation des villes, des habitants… 

Fabian nous fait découvrir sous ses yeux critiques les mutations des grandes villes et capitales dans lesquels ils transitent en partant de Stockholm, et parcourant Berlin, Bruxelles, Paris, Marseille, Rome, Athènes, Belgrade, Prague, Varsovie….

Tels deux étudiants Erasmus mais avec le recul de leur âge, ils feront des rencontres aussi touchantes qu’imprévisibles. Elles leur laisseront dans certains cas un doux goût amer. Mais chaque jour leur suggère de nouvelles satisfactions.

Varsovie est tellement disproportionnée qu’elle parait vide. On dirait que ses boulevards ont été percés pour y faire défiler les tanks.

Du bleu dans les yeux pour cette fresque politique 

Un sacré travail de Fabian pour retracer son parcours, ses rencontres, ses déboires et ses aventures multiples. Oui, au début on est tenté de l’accompagner jusqu’au bout de son expédition mais l’imposant ouvrage de 224 pages qui réunit de très belles planches n’est pas exempt de quelques longueurs. 

Mais l’originalité du traitement graphique avec cette forte bichromie de nuances de bleus à tendance à nous rapprocher de l’overdose. S’il avait, comme d’autres artistes ont pu le faire, mélangé les teintes ce roman aurait été plus comestible. 

Mais est-ce un choix délibéré en mettant l’accent sur les effets dévastateurs de la surconsommation ?

Xavier de la Verrie

Fabian Göranson (Scénariste & dessin), Un rêve d’Europe, traduit du suédois par Sophie Jouffreau, Rackham, mai 2019, 224 pages, 22 eur

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