Louis Bonaparte, une figure singulière
François de Coustin s’est fait remarquer par deux biographies : d’abord celle du duc d’Angoulême dit Louis XIX (Perrin, 2018), puis celle d’Elie Decazes (Perrin, 2020), le favori de Louis XVIII. C’est au fond assez naturellement qu’il en vient à étudier la figure de Louis Bonaparte, lié à Decazes, dans une biographie qui vient tout juste de sortir chez Perrin.
Dans l’ombre du grand frère

Louis Bonaparte a pâti d’être le frère de Napoléon et aussi le père du futur Napoléon III. Un certain mystère plane aussi sur sa naissance et l’identité de son père, peut-être le comte de Marbeuf, relancé par de récentes analyses ADN. Napoléon l’a en tout cas pris sous son aile très jeune, l’emmenant avec lui en France et faisant son éducation. Destiné au métier des armes, Louis montre sa bravoure en Italie… et aussi son dégoût des combats. Il assiste à l’ascension de son frère, dont il bénéficie, prend plaisir à la vie en caserne avant d’être marié contre son gré à Hortense de Beauharnais, belle-fille de Napoléon qui l’adore : le mariage ne sera pas heureux. Dépressif, valétudinaire, Louis ne comprend pas sa femme, plus volage, amoureuse de la vie. Ils vivront au final peu ensemble même s’ils auront trois enfants, dont le premier, Napoléon-Charles, fut un temps envisagé comme héritier par Napoléon… avant de mourir en 1808.
Roi de Hollande, son meilleur moment
Napoléon a d’autres ambitions pour lui. Il en fait un roi de Hollande, sans se douter ainsi qu’il donne à son jeune frère une cause : Louis va s’attacher à la Hollande et s’efforcer de défendre son peuple, touché économiquement par le blocus continental. Il va résister aux ordres de son frère, défendre pied à pied ses prérogatives de monarque tandis que son mariage se délite et que ses fils grandissent loin de lui. Fatigué par les pressions exercées par Napoléon, Louis finit par abdiquer en 1810, ayant deviné que la Hollande allait être annexé. Il commence alors sa vie de prince errant un peu avant les autres Bonaparte, sans jamais se réconcilier vraiment avec Napoléon qui l’a beaucoup maltraité. Louis finira par se réfugier en Italie, éduquant ses fils à distance, angoissé à l’idée de voir les deux partir rejoindre en 1831 les carbonaro : seul Louis-Napoléon survivra, sauvé par Hortense. François de Coustin se montre d’ailleurs assez sévère avec elle-même s’il reconnait que vivre avec Louis Bonaparte n’était pas une sinécure. Cette biographie retrace bien l’itinéraire de ce rebelle souvent velléitaire et parfois très attachant.
Sylvain Bonnet
François de Coustin, Louis Bonaparte, roi rebelle et mélancolique, Perrin, mai 2025, 624 pages, 25 euros