Reines et princesses au temps des Capétiens, le point de vue des femmes

Essayiste spécialiste de l’histoire médiévale, Gaëlle Audéon travaille sur la situation des femmes et leur invisibilisation dans le récit national, me dit-on. Elle a choisi ici de nous raconter l’histoire d’une trentaine de princesses capétiennes (mais pas que) qui ont marqué les XIIe et XIIIe siècles.

Être princesse au Moyen-âge

Les princesses évoquées ici n’étaient pas destinées à gouverner un état. Pour autant, certaines ont joué un rôle politique éminent, comme la fameuse Aliénor d’Aquitaine, deux fois reines (de France puis d’Angleterre) ou sa petite fille Blanche de Castille, régente de Franc pour son fils Louis IX, futur saint Louis. La loi salique n’existe pas, c’est une demi-invention du XIVe siècle faite pour empêcher le roi d’Angleterre de monter sur le trône de France. De la France et de l’Angleterre il est ici beaucoup question tant les deux pays sont entrelacés, tant Plantagenets et Capétiens se fréquentent et se font la guerre. Et les princesses sont des monnaies d’échange tout autant que des mères potentielles d’héritiers au trône.

De notre modernité

Cet ouvrage a bien des qualités dont la documentation et du style. Gaëlle Audéon sait à merveille raconter l’histoire de ces princesses ballotées par l’histoire. On retient bien sûr Aliénor qui se bat autant pour elle que pour ses fils, au premier rang son préféré Richard Cœur de Lion. On note aussi l’itinéraire d’Agnès, impératrice « latine » de la lointaine Byzance, ou encore Aelis de France, promise de Richard mais violée par Henri II Plantagenet… Et qui se remarie plus tard avec le comte Guillaume de Ponthieu. On note aussi que Gaëlle Audéon charge les portraits de Richard Cœur de Lion et de Philippe Auguste. Le premier, visiblement homosexuel, était surtout misogyne. Quant au roi de France, le voici dans ce livre accusé d’avoir consommé son mariage avec Isabelle de Hainaut alors qu’elle n’avait que dix ans (lui quinze) avant de la menacer de répudiation. Tout est réglé avec la naissance du futur Louis VIII et la pauvre Isabelle, très appréciée du peuple, meurt à vingt ans…

Philippe Auguste s’est ensuite remarié avec Ingeburge, princesse danoise, qu’il rejette violemment, je laisse le lecteur découvrir cette histoire sordide. L’affaire fait grand bruit à l’époque. Le comportement de Philippe Auguste interroge et peut choquer le lecteur contemporain. Pour autant, il convient de recontextualiser, ce que Gaëlle Audoin fait, c’est indéniable… mais ses opinions transparaissent nettement. C’est le propre des historiens et des historiennes qui ne peuvent s’abstraire en travaillant d’être aussi issus de leur époque !

Intéressant en tout cas.

Sylvain Bonnet

Gaëlle Audéon, Reines et princesses au temps des capétiens, préface d’Elaine Viennot, Perrin, février 2025, 400 pages, 24 euros

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