1520, l’entre-deux mondes
D’une démarche historiographique
C’est normalement plutôt une tradition anglo-saxonne que de prendre une année et d’en extraire pour les étudier les changements qui y sont à l’œuvre. Citons ainsi 1491 (Albin Michel, 2007) ou 1493 (Albin Michel, 2013) écrits tous deux par Charles C. Mann. L’avantage de ce type de démarche est de proposer un autre angle d’étude d’une période ou d’un évènement bien couvert par ailleurs. Conservateur du patrimoine aux archives diplomatiques, Guillaume Frantzwa propose avec 1520 au seuil d’un monde nouveau une analyse de cette année particulière au cœur de la renaissance. Mais que se passait-il donc en 1520 ?
Le calme avant la tempête ?
En 1520 il n’y a pas de conflit, la paix règne mais quelle sorte de paix au juste ? Depuis 1515, François Ier a repris le contrôle du duché de Milan et est à la tête du plus puissant royaume de la chrétienté, la France. Il a cependant échoué à se faire élire empereur face à Charles Quint, son cousin, roi d’Espagne et souverain des Pays-Bas, qu’il tient de son aïeul Charles le Téméraire. La rivalité entre les deux hommes est patente et est source de fragmentation de l’Europe, à un moment où un autre souverain, Soliman le magnifique, prend la tête de l’empire ottoman. En 1520, c’est aussi l’année du camp du drap d’or, de la rencontre entre Henri VIII et François Ier qui aboutira au rapprochement… entre l’Angleterre et Charles Quint. En 1520, François Ier ignore que la défaite de Pavie est en germe…
Une Europe en pleine mutation
Guillaume Frantzwa brosse aussi avec brio le portrait d’une Europe qui change. Commercialement, elle se tourne de plus en plus vers l’Atlantique, surtout que l’empire ottoman bloque les routes traditionnelles, contrôlées par Venise et l’Egypte. Du point de vue artistique, art gothique et renaissance italienne cohabitent, contrairement à des idées reçues du XIXe siècle, et s’enrichissent mutuellement pour donner des églises et des châteaux magnifiques. Religieusement, la chrétienté est sur le point de se diviser entre catholiques et réformés, introduisant de nouvelles relations entre le politique et le religieux.
A la fin de l’ouvrage, on se dit que 1520 a tous les atours d’une année charnière : voici donc un bon ouvrage qui propose un nouvel éclairage sur une période pourtant bien déjà bien documentée.
Sylvain Bonnet
Guillaume Frantzwa, 1520 au seuil d’un monde nouveau, Perrin, mars 2020, 272 pages, 20 eur