Les ors de la République, souvenirs de 7 ans à l’Elysée par le général Henri Bentégeat

La grande muette n’est plus ce qu’elle était, et le général Henri Bentégeat, qui a passé plusieurs années au sommet de l’état, n’a pas hésité à prendre la plume (qu’il manie fort bien) pour raconter ses souvenirs. Il ne s’agit pas à proprement parler de « mémoires », mais de faire partager au lecteur les évènements marquants d’une période qui lui a valu d’être proche du pouvoir. D’où ce titre assez évocateur Les Ors de la République, qui colle bien avec son sujet : le palais de l’Elysée. 

au cœur du pouvoir

En effet, le général Bentégeat fut d’abord nommé adjoint au chef d’état-major particulier du président Mitterrand en 1993, puis chef d’état-major particulier du président Chirac de 1999 à 2002, et enfin chef d’état-major des armées jusqu’en 2006, le plus haut grade de l’armée française. C’est donc la vie quotidienne passée dans un bureau de l’Elysée qui est ici relatée, au plus proche de deux présidents, de leurs femmes, des secrétaires généraux du palais (Védrine, Villepin), et de premiers ministres de cohabitation (Jospin, Balladur). 

De tous ces hauts personnages, il fait un portrait fidèle, ne dissimule pas plus ses admirations que ses agacements, et livre des informations précieuses sur cette période charnière entre deux siècles, qui fut parfois mouvementée. Il ne faut pas s’attendre à la révélation fracassante de secrets d’états considérables, mais à des analyses, que l’on peut juger fiables, sur telle crise (politique ou diplomatique), telle guerre (Rwanda, Irak, Cote d’Ivoire), et sur les sujets du moment où l’armée était en première ligne (abandon du service militaire, essais nucléaires), entre autres. 

les deux présidents Chirac et Mitterrand

En outre, et cet aspect du livre n’est pas secondaire, le général Bentégeat livre des impressions très personnelles sur les deux présidents Chirac et Mitterrand, qu’il a accompagnés autant dans les réunions de travail, que lors des voyages, des sommets internationaux, des dîners officiels ou des conseils de défense. Sans céder à la déférence facile, encore moins à une hagiographie mal venue, il garde en toute chose un recul suffisant pour juger à propos telle décision, ou telle attitude. Et en bon général, il respecte profondément la plus haute fonction de l’état, mais son képi lui ordonne de garder la tête froide, et de considérer avant tout les intérêts supérieurs de la patrie. 

A la fois témoignage et document, Les Ors de la République apprend bien des choses à ceux que l’histoire politique contemporaine intéresse. Il met l’armée à une place très haute quand il s’agit de prendre pour le pays les décisions les plus importantes. Il est, de plus, agréable à lire, sans emphase ni prétention démesurées, et soucieux d’une vérité objective. 

Didier Ters

Général Henri Bentégeat, Les Ors de la République, Perrin, janvier 2021, 210 pages, 17 eur

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