1919-1921, sortir de la guerre… et perdre la paix

Une entreprise ambitieuse

Cet ouvrage constitue la fin d’un cycle d’ouvrages historiques consacré à la grande guerre par un de ses meilleurs spécialistes, Jean-Yves Le Naour, et commencé en 2012. Ce dernier a en effet consacré à chaque année de la Grande guerre un volume décrivant et racontant les évènements tant politiques que militaires. Ce dernier volume, 1919-1921 : sortir de la guerre, est consacré à la période de l’après-guerre et à la négociation des traités de paix, maintenant que les armes se sont tues…

La guerre n’est pas finie

Première surprise (si l’on peut dire) : la guerre continue à l’est durant ces années-là. Il y a bien sûr la Russie qui est en pleine guerre civile mais aussi la répression de mouvements révolutionnaires, comme celui des spartakistes à Berlin ou de Béla Kun en Hongrie. On pourrait aussi citer la guerre entre grecs et turcs qui aboutit à l’expulsion des premiers des régions de Smyrne et Trébizonde, sans compter la guerre entre polonais et soviétiques en 1920 à laquelle participe un certain capitaine de Gaulle. Une chose est sûre, l’armistice de 1918 n’a pas fait taire les armes.

Des alliés désunis, une paix fragile

On ne retracera pas le détail des négociations entre alliés, très bien raconté par Jean-Yves Le Naour. On relèvera tout d’abord que Clemenceau, à qui Foch reprochera de ne pas avoir obtenu, sous une forme ou une autre, la rive gauche du Rhin, a joué ses cartes du mieux qu’il a pu. Il faut rappeler que si l’Allemagne est battue en 1918, elle garde une position géostratégique centrale en Europe, renforcée par la disparition de l’Autriche-Hongrie et l’anarchie régnant dans l’ancien empire russe.

Quant à la France victorieuse, elle n’est pas en mesure d’exercer une hégémonie en Europe, contrairement à ce que vont bientôt craindre les britanniques, à cause de sa faiblesse démographique.

La France seule face à l’Allemagne

Clemenceau a cru obtenir le saint graal avec l’alliance américano-britannique garantissant le traité de Versailles. Mais le vote négatif du sénat américain en 1920, après le départ peu glorieux de Clemenceau, fragilise l’édifice diplomatique. La France se retrouve seule face à l’Allemagne, tentée par une politique de force pour obtenir le paiement des réparations. Et l’Allemagne, elle, se voit déjà comme victime du Diktat, victime de l’arrogance française… Rien n’était joué en 1920, mais les germes d’un prochain conflit sont déjà là…

Excellent ouvrage.

Sylvain Bonnet

Jean-Yves Le Naour, 1919-1921 : sortir de la guerre, Perrin, février 2020, 544 pages, 25 eur

Laisser un commentaire