Folie douce, le dernier tour de piste de James Crumley

Les éditions Gallmeister ont décidé depuis une dizaine d’années de rééditer les romans de James Crumley (1939-2008), écrivain américain assez déjanté qui s’était fait connaître avec Le dernier baiser et Fausse Piste. Publié en 2005, Folie Douce est son dernier roman et reprend un de ses personnages fétiches, C.W. Sughrue, un dur à cuire.

Rien de solide en ce monde

« C’était une calme et belle soirée d’été dans le Montana, un samedi soir après un long week-end de softball. La pleine lune flamboyait au-dessus du mont Sentinel, découpant la gueule d’Hellgate Canyon d’un embrasement d’argent. Une langue de brume estivale s’étirait comme un filet de sang sur le visage idiot de la lune. Les lumières de la piscine du motel n’étaient plus que des lueurs pâles. »

Sughrue est censé s’être assagi. Avec sa femme, il élève un gamin qu’il a recueilli après une affaire qui a mal tournée. Il est même devenu très ami avec le docteur MacKiderick, « Mac », un psychanalyste réputé de la ville de Merriwether. Mais son cabinet est bientôt cambriolé, quelqu’un cherche à mettre la main sur les données des patients de Mac : Sughrue est donc recruté comme détective par son meilleur pote. Mais l’enquête se complique vite, les accidents se multiplient et Mac disparaît. Sughrue découvre que son ami avait plusieurs ex-femmes, que le FBI s’intéresse beaucoup à lui. Mac, en gros, cache beaucoup de secrets. Avec l’aide d’un peu de whisky et de coke, Sughrue va essayer de découvrir le pot aux roses…

Un dernier Crumley pour la route

Sans doute que notre auteur n’envisageait pas d’arrêter d’écrire mais Folie douce est son dernier roman. Nous voici avec un détective privé en train de scruter une fois de plus la noirceur du monde… sauf qu’il y a beaucoup d’humour. Les situations décrites relèvent parfois carrément de la farce ou de la commedia dell’arte. Et puis Crumley, ici en bon héritier de Chandler, a le sens des dialogues : beaucoup de répliques font hurler de rire, même si le désespoir se cache derrière les saillies. Personne ne sort indemne de ce roman parfois labyrinthique et toujours savoureux. Et je me répéterai jusqu’à la fin : Crumley, même s’il a peu écrit par rapport à d’autres (je pense à James Lee Burke, autre représentant de la fameuse école du Montana basée à Missoula), était un grand écrivain.

Sylvain Bonnet

James Crumley, Folie douce, traduit de l’anglais par Jacques Mailhos, illustré par Hugues Micol, Gallmeister, octobre 2023, 416 pages, 24,80 euros

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