666, thriller au coeur de l’ésotérisme parisien

Après s’être attaqué aux héritiers du nazismes dans Les Loups-garous d’Argentine, voici qu’il remonte la filière et s’en prend directement au Diable. 666, le chiffre de la bête, est le titre du nouveau roman de Jérémy Wulc. Et comme le précédent il installe une enquête policière sur fond de réalité historique dont les faits accumulés ne cesseront d’interroger. Et tout commence par une citation de François Mitterrand, mise en exergue du roman : « Mes chers compatriotes, je crois aux forces de l’esprit et je ne vous quitterai pas. »

Quelques femmes scarifiées

A Paris, plusieurs femmes sont retrouvées mortes, noyées puis scarifiées. Sur chacune d’elles, les mêmes symboles ésotériques : une pyramide tronquée, un œil, et le 666, ce chiffre de la bête. Ce chiffre est celui qui permet, selon la Bible, la révélation de la bête de l’Apocalypse, donc de la révélation. C’est l’augure du monde d’après. Mais la plupart des gens l’identifient au Diable, rien de moins. Alors, est-ce le Diable ou un quelconque humain bien dérangé qui commet ces crimes ?

Pour enquêter, Jérémy Wulc met en place un duo incroyablement attachant : Stanislas, expérimenté et doué, adepte de la malbouffe, qui vit mal le départ de sa femme avec les enfants. C’est un éternel râleur, qui va affronter le réel avec un premier degré féroce ; Khalid, lié par une amitié indéfectible à son comparse, et qui a l’intuition et le travail technique nécessaire pour compléter les compétences du premier. Entre leur nouveau bureau (et Wulc étrille l’institution policière) et le kebab qui est comme leur seconde maison, ils évoluent au gré des corps et des symboles.

Au commencement était le satanisme

Satan est l’incarnation d’une conscience supérieure, libérée du joug de la morale et de la religion. Il nous permet de vivre pleinement nos envies et nos fantasmes sans avoir peur du regard des autres.

Pour enquêter, ils n’ont que les symboles, alors ce sera un thriller ésotérique. Certains conduisent vers le satanisme, et c’est Justine, la nouvelle recrue, qui va se charger de ce volet. C’est dangereux, mais le souffre attire aussi bien qu’il éloigne, et cette part de l’enquête ne sera pas la moins périlleuse. Les autres symboles conduisent vers la franc-maçonnerie. Bien sûr c’est le ressort de nombre de romans policiers, mais ici il y a un petit quelque chose en plus d’incroyable, de véridique, et de bluffant ! Un puzzle à ciel ouvert qui dévoile ses secrets au fil d’un récit sanglant.

666 réjouit parce qu’on sent le plaisir de son écriture. Emaillé de petites plaisanteries et de références à la pop culture la plus régressive (et jouissive), il pose un cadre solide qu’on ne cesse d’aller vérifier pour être bien certain. Et tout est vrai. Jérémy Wulc promène son lecteur entre les symboles et les lieux, de Paris à Rambouillet, pour une enquête parfaitement réussie. Quant au lien avec l’exergue mitterrandienne, on vous le laisse découvrir !

666 rappelle qu’il faut se méfier du Diable, parce qu’il a tout pour plaire !

Loïc Di Stefano

Jérémy Wulc, 666, Pygmalion, avril 2022, 384 pages, 19,90 euros

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