Kalmann et la montagne magique, méandres islandais
On a fait connaissance avec Joachim B. Schmidt, sympathique auteur germanophone de polars, avec Kalmann, roman mettant en scène le héros du même nom, handicapé mental léger et un peu shérif à ses heures. Le voici de retour avec Kalmann et la montagne endormie, sorti en début d’année 2025.
Entre père et grand-père (la famille c’est compliqué)
« J’aurais aimé que mon père ne m’écrive jamais cette lettre. J’aurais aimé qu’il nous laisse tranquilles, ma mère et moi, pour qu’on puisse continuer à regarder des films et à manger des pizzas, juste elle et moi. On se débrouillait bien avec les jours d’été pluvieux et les soirées d’automne tumultueuses là-haut, dans le nord du pays, et notre deuil il n’appartenait qu’à nous. »

Le jeune Kalmann Odinsson vient de perdre son grand-père quand son père américain, reparti d’Islande avant sa naissance, l’invite à passer le Nouvel an aux Etats-Unis, malgré l’épidémie de COVID. Inquiet, Kalmann accepte sur l’insistance de sa mère qui pense à son bien. Et puis c’est l’occasion de connaître sa famille américaine. Mais Kalmann est préoccupé par la mort de son grand-père qui lui semble suspecte. Arrivé aux Etats-Unis, il est embarqué par son père dans de grandes parties de chasse et va à Washington le 6 janvier écouter Trump près du Capitole… Avec son drapeau islandais, il fait sensation mais est arrêté par le FBI. L’agente chargée de lui est vite convaincue de son caractère pacifique mais lui révèle que son grand-père était connu des services américains présents en Islande parce que communiste… Une fois revenu chez lui, Kalmann commence son enquête et il semble bien que son grand-père ne soit pas mort tout seul : mais pourquoi ?
Un polar à part
En ayant choisi un héros disons différent mentalement, Schmidt fait le pari de la singularité pour s’imposer dans un paysage éditorial très encombré côté littérature policière. Sa force est de doser le côté décalé du personnage et une intrigue très construite, s’inspirant de la longue présence militaire américaine en Islande. Et puis Kalmann bénéficie de notre sympathie. Toujours moqué, le gars finit par faire aussi bien qu’un enquêteur chevronné. Grâce romanesque. Kalmann et la montagne endormie plaira à beaucoup.
Sylvain Bonnet
Joachim B. Schmidt, Kalmann et la montagne endormie, traduit de l’allemand par Barbara Fontaine, Gallimard « La Noire », janvier 2025, 320 pages, 22 euros