La France avant la France, le temps des francs

Un duo d’historiens 

De Geneviève Bürher-Thierry, on connaît des ouvrages assez pointus sur l’époque Carolingienne : citons L’Europe carolingienne (SEDES, 1995). Charles Mériaux a quant lui écrit La Naissance de la France (Belin, 2014), plus centré sur l’époque mérovingienne. Animateur de la collection « Histoire de France » chez Belin, Joël Cornette a eu l’idée de les associer pour ce tome intitulé La France avant la France, annonçant ainsi la problématique de l’ouvrage, aujourd’hui repris en poche par Folio Histoire. 

La spécificité de l’antiquité tardive 

Depuis les travaux de Peter Brown, on sait que l’antiquité ne s’est pas arrêtée en Occident avec la chute de Romulus Augustule en 476. La Gaule des royaumes barbares reste profondément romaine. Quant aux barbares en général et aux Francs en particulier,  rappelons que ce sont les autorités romaines qui les ont fait venir dans le cadre d’un traité. Roi des Francs depuis 481, Clovis a l’intelligence politique de se convertir au catholicisme, ce qui facilite ses conquêtes puisqu’il devient l’allié de l’église et est même reconnu par Byzance. Clovis tente aussi de se rapprocher de la méditerranée et le VIe siècle voit se maintenir les échanges commerciaux méditerranéens par exemple. Ce sont les épidémies de peste et la conquête arabe du futur Maghreb qui mettent fin à cette antiquité tardive et orientent le royaume des francs vers l’Europe du nord. 

La Quête des origines 

Pas de France donc mais des Francs gouvernés par des rois mérovingiens descendants de Clovis qui se partagent le territoire. On voit ainsi l’Austrasie à l’est et la Neustrie à l’Ouest ainsi que l’Aquitaine. On parle encore le latin qui peu à peu évoluent vers des langues romanes. L’Eglise devient une puissance sociale de premier plan et les évêques sont issues des élites gallo-romaines et franques, bientôt en fusion.  

Les carolingiens 

Ce livre est aussi une occasion de revenir sur une époque et une famille, celle des futurs carolingiens. Notre duo d’historiens raconte très bien les étapes de leur ascension, associant aussi au pouvoir d’autres familles de l’aristocratie franque. Devenu roi, Pépin le bref fonde une dynastie en alliance étroite avec la papauté. L’idée d’Empire et de conquête est inséparable de la dynastie : on voit Charlemagne soumettre les saxons et lancer une expédition, moins heureuse, contre Barcelone. On voit aussi une administration se mettre en place, toujours appuyé sur les grandes familles aristocratiques locales (ce qui relative l’idée de « rupture » féodale au siècle suivant. Devenu Empereur en 800, Charlemagne est alors à la tête d’un vaste empire qui ne durera pas. Les querelles familiales, les raids vikings, l’ascension des Robertiens à l’ouest (futurs capétiens) mettent fin à l’empire des francs mais non à l’idée impériale, on le sait.  

La France n’existe pas de 481 à 888, les populations sont trop diverses. Mais de cette époque va naître des mythes, comme la mort héroïque de Roland à Roncevaux par exemple, qui plus tard vont hanter les sujets du roi de France, puis les français. 

Sylvain Bonnet 

Geneviève Bürher-Thierry et Charles Mériaux, La France avant la France (481-888), Gallimard, « folio histoire », septembre 2019,  784 pages, 12,10 eur

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