La France libérée de Michel Winock : le moment de la Libération

Un historien majeur

Ancien professeur à Science Po Paris, fondateur (parmi d’autres) de la revue L’histoire, engagé à gauche, Michel Winock a formé des générations d’étudiants et de futurs historiens. Il est aussi l’auteur d’ouvrages et de biographies qui ont remporté un grand succès. Citons ici Le siècle des intellectuels (Seuil, 1997), La France et les juifs de 1789 à nos jours (Seuil, 2004), Clemenceau (Perrin, 2007) et Madame de Staël (Perrin, 2010). Ici, il revient sur une période abondamment décrite, celle de la Libération.

Un pays fragmenté

Michel Winock est un historien capable de synthétiser l’enchaînement des faits dans une chronique bien écrite et accessible. Il est tout à fait à son aise pour nous restituer l’atmosphère de ces années qui suivent la période de la Défaite et de Vichy. Dès la libération des premières villes, Winock nous montre un pays déchiré, fragile, blessé que de Gaulle et ses équipes vont devoir remettre en ordre pour éviter la guerre civile (le risque existait) et affronter la dernière phase de la guerre. En mai 1945, le IIIe Reich abattu, il reste les problèmes du ravitaillement, de la reconstruction et des procès. Voici une France qui juge Pétain et bien d’autres. Il y aura des excès, envers les femmes tondues par exemple…

Une République inachevée

La Libération suscite bien des espoirs et le vent souffle à gauche, du fait de la Résistance, grâce à la victoire soviétique à Stalingrad… les premières élections enregistrent la poussée communiste qu’il s’agit d’encadrer. Nombre de réformes sont votées, dont l’instauration de la sécurité sociale (au passage, saluons Ambroise Croizat) grâce à leur poids électoral. Le retour des partis politiques et de leurs intrigues pousse de Gaulle à la démission. Au bout de plusieurs consultations électorales, la IVe République naît, malgré les critiques gaullistes et communistes. Sujette à une instabilité gouvernementale chronique, elle aura à gérer la guerre froide, la guerre d’Indochine, la décolonisation sans compter l’Algérie…Reste une France qui foisonne, danse sur des airs de Jazz, voit des  (grands) films français et américains, lit Sartre et surtout Camus. La France libérée de Michel Winock est une invitation salutaire à la nostalgie (et à la réflexion) en ces temps de crise sanitaire et politique.  

Sylvain Bonnet

Michel Winock, La France libérée (1944-1947), Perrin, août 2021, 398 pages, 23 euros

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