« La guerre sous-marine allemande », l’échec des U-Boote

 La Guerre sous-marine allemandeUn expert de l’histoire maritime

Ancien officier de marine, François-Emmanuel Brézet est docteur en histoire de l’université Paris-IV où il a soutenu une thèse de doctorat sur la construction de 1897 à 1914 de la marine impériale allemande. On lui doit un très bon ouvrage sur la bataille du Jutland (Economica, 1992), une Histoire de la marine allemande (Perrin, 1999) appréciée par les connaisseurs, une biographie de l’amiral Dönitz (Perrin, 2011) et enfin La Traque du Bismarck (Perrin, 2013). Ici il se propose de revenir sur le choix fait par les allemands de la guerre sous-marine lors des deux guerres mondiales.

 

Quelle stratégie maritime pour l’Allemagne ?

Après avoir retracé les débuts des sous-marins en Allemagne durant la belle époque, Brézet aborde la période de la Grande guerre. Les allemands ont une flotte de haute mer, développée par la volonté conjuguée de Guillaume II et de l’amiral Tirpitz, mais redoutent de l’engager dans une bataille frontale contre une Royal Navy qui a une nette supériorité tactique et numérique et qui a commencé le blocus des côtes allemandes. Le Reich décide donc d’utiliser ses sous-marins pour attaquer le commerce anglais et briser l’économie du Royaume-Uni.

Cela aboutit à provoquer les États-Unis lors du torpillage du Lusitania. L’Allemagne attendra deux ans avant de reprendre la guerre sous-marine, jusqu’à ce que le haut commandement et les milieux nationalistes l’emportent en 1917 contre le chancelier Bethmann-Hollweg, persuadés de pouvoir gagner la guerre en détruisant les voies de communication entre l’ancien et le nouveau monde. Le résultat est décevant : le tonnage coulé augmente mais pas dans des proportions qui auraient pu changer le cours de la guerre. La tactique alliée du convoi est efficace.

 

La Guerre sous-marine allemande (1914-1945)

 

Une bataille de l’Atlantique impossible à gagner ?

L’entre-deux guerres verra l’Allemagne déployer des trésors d’ingéniosité pour contourner les clauses du traité de Versailles qui lui interdisent de construire une flotte sous-marine : les allemands iront par exemple développer des prototypes en Espagne ou vendre des sous-marins à la Turquie. Hitler, après son arrivée au pouvoir, n’est pas partisan d’un fort réarmement naval qui risquerait de braquer l’Angleterre et le traité de 1935, s’il permet la naissance officielle de la Kriegsmarine, garantit la supériorité britannique. Le futur amiral Dönitz impose la tactique de la « meute », devant donner aux U-Boots l’efficacité nécessaire. Malheureusement, la campagne de Norvège met en évidence des défaillances techniques dans la mise à feu des torpilles qui mettent à mal la crédibilité des U-Boots.

La défaite de la France donne à la Kriegsmarine de solides bases pour mener la guerre contre l’Angleterre mais Hitler met la priorité à la guerre à l’Est, malgré les demandes de Dönitz et du grand amiral Raeder d’intensifier la production des U-Boots. Si la bataille de l’Atlantique est finalement gagnée par les alliés malgré les succès allemands de 1942 et 1943, c’est en grande partie grâce à l’ASDIC (l’ancêtre du sonar) et au déchiffrage des codes allemands d’Enigma, grâce aux efforts d’Ultra et du cercle de Bletchley Park. Le courage des équipages allemands était ici au final inutile. Voici un livre important sur un sujet méconnu mais capital pour comprendre l’histoire de la seconde guerre mondiale.

 

Sylvain Bonnet

 

François-Emmanuel Brézet, La Guerre sous-marine allemande (1914-1945), Perrin, août 2017, 416 pages, 23,50 euros

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