7 sources d’inspirations de Game of Thrones
George Raymond Richard Martin (George R. R. Martin) est l’auteur de la saga romanesque Le Trône de Fer, devenue Game of Throne, la série télévisée de tous les records. L’écrivain américain n’a jamais fait mystère de certaines de ses sources d’inspiration. En voici sept, certaines déjà connues, mais plusieurs surprenantes. Les connaissiez-vous toutes ?
La Guerre des Deux-Roses (1455-1485)
Ce conflit entre la maison des Lancaster, la rose rouge, dont le nom Lannister semble être le paronyme, et la maison des York, la rose blanche, comme la neige des Stark, là encore aux sonorités étrangement proches, deux branches de la dynastie des Plantagenêt. Ce conflit selon certains historiens serait né de l’incompétence du roi Henry VI, à l’instar de l’incurie de Robert Baratheon, bien qu’Henry VI ait souffert de folie, à l’instar également d’Aerys Targaryen le roi fou. Notons que son épouse sert de modèle pour Cersei et leur fils pervers pour Joffrey.
Le récit en est au moins aussi tortueux et complexe que les intrigues de Westeros, et Martin s’est inspiré de nombreux épisodes de ce long affrontement. Retenons que la maison des Lancaster en sort victorieuse, amenant le règne des puissant Tudor, et avant eux le Duc de Gloucester, Richard, dont Shakespeare contribua à établir la « légende noire » dans son admirable Richard III. Le même Richard qui condamnera la maîtresse de son frère Edward à une marche de la honte, comme celle de Cersei ! Et Henry VII, de la famille Tudor, parvenant sur le trône et mettant ainsi fin à la guerre, n’a-t-il pas été élevé à l’étranger, comme une certaine Daenerys ? Le procès de Margaery Tyrell, dont le symbole familial est justement une rose, s’inspire du procès d’Ann Boleyn : accusation d’inceste avec le frère, condamnation d’une intelligente beauté aux cris d’orfraie d’une morale hypocrite digne de celle du Grand Moineau de Port-Réal ! Notons aussi qu’au-delà de la rose rouge, le lion est présent dans les armoiries des Lancaster comme dans celles des Lannisters !
L’histoire écossaise
L’histoire écossaise fournit deux événements qui nourriront le célèbre épisode des « noces pourpres », central dans l’œuvre de Martin : tout d’abord le « Black Dinner » de 1440 ; en pleine dispute pour la régence du roi, William Crichton invite le duc de la famille Douglas et son jeune frère à festoyer au château d’Edinbourg. Mis en présence d’une tête de sanglier, symbole de mort, les deux hommes furent sommairement jugés et décapités. Voilà qui rappelle le sinistre simulacre qui affubla Robb Stark de la tête de son loup ! En 1692, trente-huit membres du clan MacDonald furent massacrés alors qu’ils étaient hébergés par le clan Campbell. Cet épisode est connu sous le nom « Massacre de Glencoe ».
L’histoire de l’empire romain
L’histoire de l’empire romain sert d’inspiration pour le fameux Mur séparant le nord mystérieux peuplé de Sauvageons et le reste de Westeros. Le Mur d’Hadrien, que George Martin parcourut pour l’élaboration de ses romans, fut bâti entre 122 et 127 sur ordre de l’empereur Hadrien. D’une longueur de 117,5 kilomètres il était flanqué de 300 tours et protégés par 17 camps fortifiés. Martin signale que sur les 19 châteaux censés être occupés par la Garde de nuit, seulement 17 ont été réellement utilisés : le clin d’œil paraît crédible ! Le Mur devait empêcher les invasions des clans Pictes d’Écosse, de Calédonie comme on l’appelait alors.
Tu quoque mi fili
Comment ne pas voir dans la trahison que subit Jon Snow de la part de ses frères de la Garde de nuit une réécriture de l’attentat politique le plus célèbre de l’histoire occidentale, la mort de Jules César poignardé par son fils ? Et comment ne pas voir l’ombre de l’histoire des empereurs julio-claudiens planer sur de nombreux événements de la saga de Martin ? Certes, Suétone, dans De vita duodecim Caesarum, Vie des douze Césars, fait office de propagande davantage que d’exactitude, qualité que seuls les historiens au sens moderne du terme peuvent revendiquer ; mais par exemple la nature des relations incestueuses entre Caligula et sa sœur, cela rappelle fortement le couple Cersei-Jaime. La consanguinité est au cœur de la famille Lannister.
Les Rois maudits
Cette série française a été diffusée en 1972 et en 2005 pour sa seconde adaptation. Elle est tirée d’un cycle romanesque en huit volumes paru entre 1955 et 1977, écrit par Maurice Druon, le héros de Martin (comme on a pu le lire dans un entretien accordé au journal The Guardian le 5 avril 2013 : « My hero : Maurice Druon »). Martin se dit fasciné par la monstruosité historique des Capétiens et des Plantagenêt. La psychologie des grands seigneurs telle que la développe Druon a servi de modèle à George Martin. Selon Martin, Druon serait le continuateur de la tradition du roman historique dans le style d’Alexandre Dumas.
Moi Claude Empereur (I, Claudius)
Cette série de 1976, diffusée par la BBC et admirée par George Martin, est l’adaptation d’un autre écrivain de romans historiques, Robert Graves. L’empereur Claudius écrit ses mémoires et raconte les horreurs, secrets obscurs et déviances de la dynastie des Julio-Claudiens, s’inspirant grandement de l’ouvrage de Suétone Vie des douze Césars. Martin admirait particulièrement les brillants dialogues de la série, magnifiquement interprétés par une éblouissante distribution : Sir Derek Jacobi (Gosford Park, Cadfael), John Hurt (Elephant Man, 1984), Patrick Stewart (Star Trek), John Rhys-Davies (Indiana Jones, The Lord of the Rings), Simon MacCorkindale (Manimal !) et les admirables Brian Blessed et Siân Phillips, incarnant avec une morgue irrésistible le couple Auguste-Livia. On reconnaîtra dans la tête blonde et bouclée de Caligula-John Hurt un certain jeune roi blond aux perversions naissantes, Joffrey Lannister. Quant aux exploits sexuels de Messaline et aux dessins pornographiques dont se régale Tibère en compagnie du jeune Caligula, ils sont révélateurs de l’iconoclasme salutaire dont Martin fit preuve en « sexualisant » la fantasy.
Donjons & Dragons
Enfin, n’oublions pas que George R.R. Martin est un rôliste : le jeu de rôle est une activité à laquelle il s’adonna notamment pour les romans de la série Wild Cards. Si les œuvres de fantasy semblent nécessairement s’inspirer de Tolkien et de Donjons & Dragons, il semblerait que le père de tous les jeux de rôle ait pu fournir une source méconnue : en 1995 un univers de jeu conçu dès 1994 pour Advanced Dungeons & Dragons vit le jour. Cet univers se nomme Birthright. Il s’agit d’une gamme exigeante, mêlant gestion féodale, stratégie et tactique militaire, et mettant les joueurs dans la peau de souverains ou de nobles importants. Un des royaumes de cet univers de jeu se nomme Anuire. Cet empire est sans dirigeant et plongé dans une crise interminable et complexe où tous les coups sont permis, où les familles nobles se livrent à une lutte sans merci pour… le trône de fer ! Oui, c’est ainsi que se nomme le siège du pouvoir impérial dans cette partie de l’univers de Birthright. En 1995, parut pour accompagner le jeu un roman intitulé The Iron Throne, qui comportait des thématiques bien plus adultes et évoluées que les romans habituels dans les univers fantasy du jeu de rôle AD&D. Le premier roman de la saga de Martin parut en 1996.
Romain Estorc
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