La naissance du christianisme, une genèse lente et difficile

Un historien du christianisme

Professeur à la Faculté de théologie de l’Université de Genève, Enrico Norelli est un spécialiste reconnu des origines du christianisme. On lui doit notamment un ouvrage sur Jésus de Nazareth. Nouvelles approches d’une énigme avec Daniel Marguerat (bien connu des amateurs des séries documentaires Corpus Christi et Les Origines du christianisme de Gérard Mordillat et Jérôme Prieur) et Jean‑Michel Poffet paru aux Éditions Labor et Fides en 1998. La Naissance du christianisme est d’abord paru chez Bayard en 2015 et est repris en poche par Gallimard dans sa collection folio histoire.

Le mystère du début du christianisme

Au fond, Enrico Norelli essaie de répondre à une question simple : comment un mouvement né de la prédication d’un prophète charismatique mais mort encore jeune sur la croix a-t-il réussi à perdurer puis à se diffuser au sein du monde romain ? Passionné par les liens entre Christianisme et judaïsme antiques, Enrico Norelli insiste bien sûr sur le rôle de Paul, l’apôtre qui n’a pas connu Jésus mais qui a été foudroyé sur le chemin de Damas, dans la décision -plus progressive qu’on ne croit et qui ne prendra sa pleine dimension qu’après l’échec de la révolte juive de 66-70 – d’évangéliser les « gentils », les non-juifs et d’abord ceux qu’on appelle les « craignant-dieux », attirés par la morale juive et le monothéisme mais toutefois rebutés par les conditions de pureté. Judaïsme et Christianisme mettront longtemps à se séparer. A Jérusalem, c’est Jacques, le frère de Jésus (il y en a que ça va secouer) qui dirige la communauté chrétienne dans les années 40-60 et il essaie de conjuguer le respect de la loi mosaïque et la foi en Jésus. Vaste entreprise… qui disparaîtra dans les oubliettes de l’histoire.

Conflit et dialogue avec l’Etat romain

Comme beaucoup d’autres, Enrico Norelli s’attache à l’analyse des rapports entretenus par les communautés chrétiennes avec l’Etat romain. On voit Pline le jeune, gouverneur de Bythinie, poser des questions à Trajan sur l’attitude à adopter face à cette « secte » qui se dégage du judaïsme. Les chrétiens, par leur refus de sacrifier au culte impérial, susciteront des réactions parfois violentes des autorités romaines : persécution des années 250 puis celle de Dioclétien au début du IIIe siècle. On voit aussi à travers ce livre l’effervescence théologique entourant la nouvelle religion : évangiles apocryphes, gnostiques mais aussi Marcion, l’homme qui va au bout des raisonnements de Paul et qui tente de couper le christianisme de ses racines juives. Très bonne synthèse.

Sylvain Bonnet

Enrico Norelli, La Naissance du christianisme, traduit de l’italien  par Viviane Dutaut, Gallimard, « folio histoire », février 2019, 448 pages, 8,40 eur

Laisser un commentaire