Robespierre, la vertu et la terreur

Spécialiste de la période révolutionnaire, Antoine Boulant s’est récemment fait remarquer avec une biographie très fouillée de Saint-Just (Passés composés, 2020) qui venait après une synthèse très complète sur le tribunal révolutionnaire et son activité (Perrin, 2018). Il revient ici, peu après Marcel Gauchet, sur l’itinéraire et la figure plus que controversées de Robespierre, dit « l’Incorruptible ».

Devenir Robespierre

Singulier itinéraire que celui de ce natif d’Arras, issu de la bourgeoisie et marqué dans son enfance par le décès de ses deux parents. Il fait cependant de bonnes études et devient avocat. C’est son tempérament qui le distingue : Robespierre est solitaire, rude, renfermé, pas drôle du tout comme dirait les jeunes d’aujourd’hui. Et il se prend très au sérieux. Il s’avère un redoutable plaideur, sollicitant l’émotion des juges en faveur de ses clients. Il gagne ses procès souvent mais s’enrichit peu. L’avocat Robespierre choisit des clients peu fortunés et il ne sait pas de surcroit faire sa cour auprès des autorités. Il réussit néanmoins à se faire élire aux états généraux.

L’homme de la Révolution, coûte que coûte

À partir de là, Robespierre devient l’avocat du peuple, toujours « bon ». Peu importe qu’il n’ait jamais vraiment défini cette notion de peuple, elle lui sert pour désigner ses ennemis : aristocrates, évêques, contre-révolutionnaires, traîtres à la Révolution. Robespierre dans les années 1789-91 sait aussi se faire le porte-parole de causes qui nous parle, comme celle du droit de vote pour les libres de couleurs dans les îles et ensuite de l’abolition de l’esclavage, sans compter son engagement pour l’abolition de la peine de mort dans le droit pénal commun. Car Robespierre se radicalise peu à peu, prônant au nom de la défense du peuple un radicalisme qui le pousse à couvrir des massacres comme ceux de septembre 1792 puis le coup d’état anti-girondin de juin 1793 qui d’emblée assassine la démocratie parlementaire naissante. On pourrait parler aussi de son « oui » à l’exécution de Louis XVI ou de son soutien aux lois de Prairial. Robespierre est co-responsable (il n’est pas le seul et a certainement été un bouc émissaire facile) de la Terreur au nom d’une liberté du peuple plus idéale que réelle.

Robespierre, la vertu et la terreur est un excellent ouvrage en tout cas sur cet itinéraire qui ne laisse toujours pas indifférent plus de deux siècles après. Et très belle iconographie.

Sylvain Bonnet

Antoine Boulant, Robespierre, la vertu et la terreur, Perrin « bibliothèque des illustres », août 2022, 256 pages, 25 euros

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