La Vieille anglaise et le continent, fable écolo futuriste

Après avoir consacré toute sa vie à la défense de la nature, ce qui inclus combattre l’homme et ses méfaits, la richissime Lady Ann Kelvin, vieille anglaise passablement désagréable, est sur le point de mourir. A la voir, elle l’est presque déjà. Pourtant, une idée lui tient à cœur : continuer son combat, après la mort. C’est le point de départ de La Vieille anglaise et le continent, adapté de la nouvelle de Jeanne A. Debats par Valérie Mangin au scénario et Stefano Martino au dessin. Une bande dessinée magnifique.

Mamie sea shepherd

Combattante acharnée de la cause écologique, Lady Kelvin reçoit la proposition que personne ne peut espérer : la possibilité de poursuivre le combat de toute sa vie. Pour cela, elle va devoir accepter le pari fou d’opérer un transfert quantique de son corps humain — en triste état, rabougri jusqu’à la limite — à celui d’une baleine.

Le procédé de la transmnèse, imaginé par Jeanne A. Debats, rend possible le rêve d’immortalité. Bien sûr, il faut une grande fortune et une minimale morale pour y accéder, comme tout progrès scientifique… Et il y a aussi un prix à payer : il faut accepter de quitter son corps. Si l’âme est le centre réel de la vie et de la personne, alors il s’agira de l’ôter du corps initial pour la transplanter dans un corps réceptacle. Et Lady Kelvin se voit proposer un corps incroyable : celui d’une baleine.

Jusqu’à son dernier souffle, et au-delà, Lady Kelvin mènera donc un combat pour la cause animale, et maintenant son intelligence pourra mouvoir le corps puissant de la baleine, et combattre au fond des océans, reliée aux scientifiques par un système de communication

Une fable écologiste

La Vieille anglaise et le continent est bien plus qu’un récit de science-fiction. C’est un rêve. Qui conquiert d’abord par la beauté, autant les planches magnifiques de Stefano Martino que par l’immersion en elle-même dans le monde des baleines, des profondeurs. Il y a une vraie poésie, quand le récit soudain est en suspension, et que rien ne compte plus que l’apprentissage de Lady Kelvin la baleine de son nouvel environnement, des règles de sa nouvelle vie. Même si elle ne va pas oublier son sacerdoce et engager un combat corps-à-corps contre les baleinier, toujours à s’exposer pour défendre la nature, il y a ces moments d’apesanteur, de paix. Comme l’ivresse des profondeurs.

La Vieille anglaise et le continent est un conte écologique d’une grande beauté, qui s’attache à la puissance de la conviction pour porter un rêve. Le support de la science-fiction est là pour donner au rêve la technologie adaptée, mais le rêve seul vaut.

Loïc Di Stefano

Valérie Mangin (scénario) & Stefano Martino (dessin), La Vieille anglaise et le continent, adapté de la nouvelle de Jeanne A. Debats, Drakoo, août 2023, 88 pages, 17,90 euros

La nouvelle est disponible chez Folio SF.

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