Le Jeune homme de Crawley, l’histoire du leader de The Cure
En bad trip dans sa chambre, alors que tous les siens (famille et amis) sont réunis au rez-de-chaussée pour son anniversaire, Robert Smith se laisse hypnotiser par un cadre photo numérique sur lequel défilent pour ainsi dire toute sa vie. Et il replonge dans chaque moment emblématique de sa vie et de sa carrière. Ces allers-retours forment la trame du roman biographique que Jérémy Wulc consacre au leader du groupe The Cure, Le Jeune homme de Crawley.
Robert Smith est un gamin un peu particulier, chahuté par les autres mais toujours très calme et introspectif. Il n’a pas d’ami mais cela lui importe peu. Jusqu’à ce qu’une amie de sa mère vienne prendre le thé avec son fils. Et les deux deviennent immédiatement inséparables, comme fusionnel. Robert et Laurence « Lol » Tolhurst seront envoyé dans la même école, et feront de leur transport en bus le moment privilégié pour construire leur histoire. Un peu plus tard, un troisième larron, Michael Dempsey, vient s’ajouter et plus tard ces trois amis, partageant la même passion de la musique, forment ce qui deviendra le plus grand groupe de rock des années 1980.
Des premiers petits succès du groupe jouant des reprises dans les pubs locaux jusqu’aux immenses concerts dans des stades plein, il y a l’histoire d’amitiés qui se délitent, de mal-être qui se révèlent. L’homme qui va permettre de garder soudé ces trois amis, malgré les angoisses de Robert, l’alcoolisme de Lol et les désillusions de Michael, ce sera Chris Parry, qui vient de quitter Polydor pour créer son propre label, Fictions records, et signer The Cure ! Son talent permettra de faire de Robert Smith un grand créateur, mais ne pourra rien contre les dissensions et les ruptures. D’abord Michael, le bassiste, qui n’appréciait pas le style cold wave inspiré de Joy Division vers lequel Robert orientait son groupe, car son emprise était de plus en plus forte. Il sera remplacé par Simon Gallup, qui apportera son jeu mélodique incroyable à la légende du groupe. Puis, à cause de son alcoolisme incontrôlable, Lol lui-même sera exclu du groupe, après de de nombreuses années à supporter ses débordements et son inactivités. Bien plus tard, avant de revenir, Simon s’éloignera aussi… Si tout est sans doute lié à la personnalité de Robert Smith, ses démons y furent pour beaucoup…
Il faut aussi compter sur Mary, son ange gardien, la femme de sa vie depuis qu’ils ont quinze ans, celle qui saura le sortir de tous ses gouffres, qui aura des qualités de patience incalculables et qui saura être cet îlot de solidité et de simplicité vers lequel toujours Robert revenait, pour se ressourcer, pour redevenir lui-même et non plus le personnage qu’il était sur scène, même si la frontière entre les deux était de plus en plus fine (Robert était-il lui-même sans son maquillage ?).
Jérémy Wulc est d’abord un fan, heureux d’avoir pu rencontrer et échanger avec ses idoles. Il signe d’ailleurs, dans ses remerciements, un très direct « ROBERT SMITH : JE T’AIME ! » S’il passe sous silence la part de l’expérience musicale de Robert Smith hors The Cure (comme guitariste de Siouxsie and the Banshees, notamment), il concentre son histoire sur les relations de Robert et des siens au fil des évolutions du groupe. C’est un livre de fan, mais pas un livre réservé aux fans : ce roman biographique raconte la montée et la chute d’un petit gars de banlieue qui vivait pour sa passion et su, par l’amour de sa femme, survivre à ses démons. C’est l’histoire universelle du rock !
Loïc Di Stefano
Jérémy Wulc, Le Jeune homme de Crawley, l’histoire du leader de The Cure, E/P/A, 250 pages, 22 euros