« L’Homme qui rêvait d’être Dexter » de Stéphane Bourgoin

Dexter est une série tv à grand succès diffusée entre 2006 et 2013, qui raconte les aventures d’un policier de Miami, bien sous tous rapports, s’épanouissant comme tueur en série. Adapté du roman de Jeff Lindsay, Ce Cher Dexter, il est inspiré directement par un fait réel, celui d’un ancien policier devenu criminel. Mais, par un retournement malicieux, à son tour la série Dexter va inspirer un grand nombre de criminels, dont un ancien policier…  Ou, comme le dit Stéphane Bourgoin dans son L’Homme qui rêvait d’être Dexter :  « Quand je vous dis qu’il y a de quoi perdre la tête entre réalité et fiction »

 

Le meilleur spécialiste des tueurs en série

Stéphane Bourgoin est l’incontestable spécialiste des tueurs en série. Ses nombreux ouvrages sont nourris de rencontres privilégiées avec les pires monstres de la planète, de documents inédits et d’une culture du crime assez incroyable. Ajoutée à cela une facilité dans le récit, ses livres sont autant de références, qu’il s’agisse de monographies comme le portrait de Gerard Schaefer (Sex Beast : sur la trace du pire tueur en série de tous les temps) ou de recueils thématiques (999 ans de serial killers, Mes Conversations avec les tueurs, etc.).

Stéphane Bourgoin a déjà eu l’occasion de s’exprimer sur le cas Dexter, notamment à l’occasion de la diffusion de la série en France. Mais son travail ici est simplement admirable. D’abord, il rappelle qui était Manny Pardo, inspecteur du Miami Police Department qui tuait des dealers. Puis il tisse les liens entre Manny Prado et Dexter. Et après avoir donné des exemples de copycat killer, il revient sur le cas de Mark Twitchell — le « meilleur » copycat de Dexter — en donnant, en complément de son étude de cas, deux documents inédits récupérés dans la sauvegarde de son ordinateur, deux témoignages servant d’auto-analyse et restés inédits à ce jour.

 

Je dépose la jambe coupée dans un grand sac pour m’attaquer à la cuisse qui est plus épaisse, avec plus de chair aussi. Je remarque que ce n’est pas aussi dégueulasse qu’à la télévision ou au cinéma. Démembrer un corps humain est un événement plutôt tristement banal. Mais j’y ai mis de l’excitation. Je me suis mis à chanter, à me chanter et à me dire quels nouveaux outils acheter pour que la prochaine victime soit encore plus facile à disséquer. / Je tranche les bras à la hauteur du coude puis je me sers des ciseaux pour trancher les doigts afin de retarder l’identification. Ce type est plutôt banal dans son apparence extérieure. / Couper la tête est une tâche tout aussi aisée, y compris la colonne vertébrale qui ne me pose aucun problème. »

 


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« Cette histoire est basée sur des faits réels […] Elle montre mon cheminement pour devenir tueur en série »

Mark Twitchell est un canadien né en 1979 qui a toujours rêvé d’être réalisateur. Son projet inachevé de fan-fiction sur Star Wars ne lui prenait pas toutes ses journées, qu’il parait, comme Roman, à errer ou a attendre dans un café. Puis il rentrait le soir chez lui, embrassait sa femme, jouait avec sa petite fille. En 2008, il est arrêté et en 2011 il est condamné pour le meurtre de John Brian Altinger, qu’il avait« chassé » sur un site de rencontres en utilisant un faux profil sexy. Maîtrisé avec difficulté, Altinger est découpé en morceaux… Mais la réalité de l’acte n’est pas au niveau du fantasme. C’est sa seconde tentative, mais la première proie s’est échappée.

On admire l’érudition de Stéphane Bourgoin et sa capacité d’organiser les cas étudiés. Dans L’Homme qui rêvait d’être Dexter on admire en outre sa capacité à convoquer autant de cas qu’il en a besoin pour convaincre du bien fondé de sa théorie. Comme s’il puisait dans l’immensité de son esprit encyclopédique ! Il nous fait vivre toutes les étapes des crimes, de la psychologie initiale au décompte des victimes, sans oublier l’es enquêtes, les procès, non plus que les détails les plus sanglants (avec une rigueur toute scientifique).

 

Avec L’Homme qui rêvait d’être Dexter qui se dévore, Stéphane Bourgoin explore un cas vraiment passionnant et montre encore qu’il est le maître incontesté du récit de genre et qu’il sait faire vivre comme personne l’esprit malade des tueurs en série.

 

Loïc Di Stefano

 

Stéphane Bourgoin, L’Homme qui rêvait d’être Dexter, les terrifiantes confessions du réalisateur d’un Star Wars devenu serial killer, Ring, mars 2018, 270 pages, 19,95 euros

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