Michel Audiard, le livre petit mais costaud

Audiard et moi

C’est ma faute. C’est ma très grande faute. Chaque matin, je me flagelle, je me vilipende, je m’effondre. Quand, en 2001, j’ai eu l’audace de publier une biographie sur Michel Audiard, je n’en imaginais pas les dommages collatéraux. 

Il faut se souvenir qu’à cette époque, personne ne parlait de Michel Audiard, hormis pour le traîner dans la boue et le rabaisser au rang de suppôt du cinéma commercial. Honte à lui ! J’eus d’ailleurs du mal à convaincre un éditeur de se plonger dans l’aventure. Une biographie sur un scénariste-dialoguiste ? Jacques Prévert oui, Michel Audiard, non ! 

Et puis, petit à petit, l’idée a fait son chemin. On s’est mis à redécouvrir le grand homme. Ses répliques n’ont plus été traitées avec condescendance mais avec intérêt. Et si le faiseur de bons mots était un auteur ? Ah la belle idée ! Belle mais tardive car le Michel était déjà passé de vie à trépas. 

D’autres livres ont vu le jour. Et d’autres encore. Et toujours d’autres… J’avoue — et là je ne me flagelle plus mais je m’écartèle — en avoir commis quelques-uns (Audiard en toutes lettres, Le Petit Audiard illustré, Le Petit Audiard inédit…). Mais je ne suis plus le seul ! Ils vont venus, ils sont tous là, même ceux du Sud de l’Italie. Ça se bouscule sous la casquette du Petit Cycliste. De quoi remplir des rayons entiers, alourdir des planches, obstruer les bibliothèques.

Et voilà le dernier né (enfin, quand je dis « dernier », je sais bien que ça ne sera pas le cas !). Le dernier en date, on va dire. Sachant qu’une date ça se périme vite, surtout au soleil.

Audiard digest

Je dirais qu’il s’agit d’un digest. Michel Audiard, le livre petit mais costaud est un livre pour les amateurs des dialogues d’Audiard qui ne connaîtraient pas la carrière d’Audiard. S’y retrouvent la plupart des informations essentielles pour aborder cet auteur pas comme les autres.

Philippe Lombard présente la plupart de ses films (mais pas tous !), leur consacrant quelques lignes ou plusieurs pages, selon leur importance. Il ajoute des anecdotes, des « gros plans » sur divers acteurs, réalisateurs ou collaborateurs. Jamais pesant, toujours léger, on ne risque pas d’attraper une méningite. 

Outre le texte, la grande force des livres publiés chez Hugo Image réside dans leur présentation et leurs illustrations. Ça grouille de photos (et de répliques mises en évidence, of course) et rien qu’à feuilleter c’est un véritable plaisir, pour ne pas dire un bain de jouvence. Toutes les grandes pointures sont au rendez-vous : Gabin, Ventura, Belmondo, Blier, Delon, Carmet, Girardot, Darc… Elles défilent dans une grande parade de la décontraction et du talent. Et tout ça joue qui du hautbois qui de la flûte à bec sur des partitions d’Audiard. Lequel s’est aussi parfois improvisé chef d’orchestre, ce qui ne fut pas sa meilleure idée. 

Comme Lombard connaît ses classiques, il prend soin de citer l’un de mes opuscules (c’est mon côté midinette de souligner ce détail dans mes chroniques). Il a aussi puisé ailleurs et, en ratissant large, il a enrichi son ouvrage.

Personnellement, je n’ai rien appris ; mais je me suis beaucoup amusé. Et cela me confirme à quel point Michel Audiard fut un rouage essentiel du cinéma populaire français. Il méritait cette tardive réhabilitation et aurait trouvé plaisant l’hommage que lui rend Philippe Lombard.

Quant aux « jeux » qui parsèment le livre sont d’une inutilité totale. 

Philippe Durant

Philippe Lombard, Michel Audiard, le livre petit mais costaud, Hugo Image, octobre 2020, 222 pages, 18,50 eur

Laisser un commentaire