Conversation avec Mona Ozouf, l’observatrice
Une historienne émérite
L’amateur d’histoire, particulièrement celui qui s’intéresse à la Révolution française, a souvent croisé le chemin de Mona Ozouf. On lui doit des ouvrages remarqués et remarquables comme La fête révolutionnaire (Gallimard, 1976), L’homme régénéré, essai sur la Révolution française (Gallimard, 1989) ou Varennes, la mort de la royauté (Gallimard, 2005). Plus récemment, elle a remporté un grand succès avec Composition française : retour sur une enfance bretonne. Les éditions autrement publient ici un entretien qu’elle avait accordé à la revue Zadig, dirigée par Éric Fottorino, pour son premier numéro.
Une méditation sur son enfance…

Notre historienne revenait ainsi sur son enfance, marquée par la mort de son père, un instituteur attaché à la défense de la langue et de la culture bretonne. Chez elle, on ne peut pas dire que la France et son école étaient appréciés. Mona Ozouf fut une enfant à la double culture bretonne et française, ce qui fut complexe mais pas problématique. Être enfant à la fin des années trente laissait beaucoup de place au rêve et à l’imagination, dans une société qui n’était pas envahie par les images en permanence. La jeune Mona, passionnée par la géographie, a ainsi passé beaucoup de temps à rêver des paysages français à partir des noms des villes et des coins de France.
Et les Gilets jaunes ?
Spécialiste de la Révolution française, Mona Ozouf est donc interrogée sur le mouvement des gilets jaunes, une de nos secousses contemporaines (et on peut dire qu’on n’en manque pas !). Elle relève des analogies avec sa période de prédilection, comme ces cahiers rédigés en 2019 lors du grand débat et relégués depuis dans un coin de Matignon (Michel Barnier a voulu les lire !), écho aux cahiers de doléances de 1789. Elle s’amuse du RIC, déjà proposé en son temps par Condorcet, et s’émeut de la violence exprimée contre la personne du chef de l’Etat, prélude possible d’une violence plus concrète. Puis elle remarque avec beaucoup de clarté la vacuité du programme du mouvement : pas de rêve, pas d’utopie, pas de ré-enchantement du monde juste le retour aux 90 Km/h… voilà un bel entretien !
Sylvain Bonnet
Mona Ozouf, Conversation avec Mona Ozouf, autrement, novembre 2024, 76 pages, 8,50 euros