Le Salon d’Oscar Lalo, hommage à la littérature

Comment la rencontre fortuite avec un livre quine semble pas être à sa place peut-elle changer une vie ? C’est ce que raconte Oscar Lalo dans Le Salon, où il sera question de Flaubert, d’un libraire et d’un salon de coiffure.

Le bac à un euro

Il n’y a pas de hasard, il n’y a que des rencontres. Ainsi, le narrateur du Salon rencontre, alors qu’il tuait un peu le temps avant un rendez-vous chez son coiffeur, La Tentation de Saint Antoine. Sommet fort hiératique de l’œuvre flaubertienne, sa présence dans un bac à un euro, avec le dépotoir des livres solubles dans l’actualité, l’intrigue. Il s’en saisit, en vient à discuter avec le libraire… Tant et si bien que le voilà en retard ! La honte le gagne, lui qui ne sait rien du contact des humains. Il s’enfuira sans avoir réglé son souci capillaire, puis ira se réfugier dans un autre salon, si tant luxueux qu’il en perdra tout contrôle de lui-même. Et il ne pourra payer sa dette qu’après un étrange accord : il lire Flaubert et enseignera la littérature.

De cette toute petite anecdote va découler un grand bouleversement, car le narrateur n’y connait rien, à Flaubert ! Alors c’est auprès du libraire taciturne qu’il va aller apprendre. Et se forme, entre le narrateur le libraire et son nouveau coiffeur, un triangle étrangement amoureux, au sommet duquel trône la littérature.

Gradus ad Parnassum

Flaubert est ici considéré comme un sommet qui ne pourra être atteint qu’après avoir conquis d’autres étapes plus aisées. Il s’agit de la littérature comme adversité, mais pour devenir meilleur à soi-même. Il y a donc toute une éducation à faire. Et Le Salon est cette histoire d’un homme-enfant qui va trouer son vrai père, trouver sa voie, trouver sa vie. On croise aussi bien Gérard de Nerval que Yannis Ritsos, et le libraire s’avère un merveilleux professeur. Il fait lire, et c’est en lisant que le narrateur va finalement devenir lui-même.

Le Salon est un bel hommage à la littérature, à sa magie propre. Et Oscar Lalo fait de Flaubert le saint patron des écrivains, le passeur, l’éveilleur. Quel beau patronage pour un roman touchant et intelligent à la fois, qui, dans une écriture sensible et élégante, prône l’élévation par la littérature.

Loïc DI Stefano

Oscar Lalo, Le Salon, Plon, août 2022, 151 pages, 18 euros

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