La vie secrète des arbres de Peter Wohlleben en bande dessinée

En 2015, Peter Wohlleben publie Das geheime Leben der Bäume, il s’en vend 700 000 exemplaires en Allemagne. Les éditions Les Arènes le publie en 2017 : ils vendent 250 000 exemplaires de La Vie secrète des arbres, sous-titré Ce qu’ils ressentent. Comment ils communiquent. De par le monde il s’en est vendu plus d’un million, en 32 langues… Fred Bernard et Benjamin Flao en ont publié une adaptation en bande dessinée, aux Arènes toujours.

Finie la boucherie !

En tant qu’ingénieur forestier, Peter Wohlleben a exploité 1 200 HA de forêt près du village de Hümmel… le mot est bien choisi. Selon le dictionnaire, exploiter signifie « tirer profit d’autrui ou utiliser habilement quelque chose à son avantage » … En toute inconscience, pendant trente ans, Peter Wohlleben s’est conduit vis-à-vis des arbres comme un boucher :

« J’avoue qu’à cette époque j’en connaissais autant sur la vie secrète des arbres qu’un boucher sur la vie affective des animaux », dit-il.

Jusqu’au déclic : il découvre un jour sous la mousse, dans un recoin de la forêt resté sauvage, une vieille souche de 1,3 mètre de diamètre : celle d’un vénérable hêtre qui a dû être abattu il y a 400 ans. À son grand étonnement, elle vit toujours ! Une seule explication : les hêtres alentour ont dû le maintenir en vie.

 « J’étais éberlué, dit-il, les arbres avaient-ils une organisation sociale structurée comme celle des fourmis ? ».

 Il découvrira plus tard qu’en effet les arbres sont des végétaux sociaux, ils communiquent entre eux par leurs racines, mais aussi par un immense réseau de rhizomes qui vivent avec eux en toute commensalité, en leur apportant des sédiments et de l’eau en échange de glucose. De ce réseau souterrain, on n’en connait que ses fruits qui apparaissent au jour : les champignons qui éclosent à l’air libre. Il parait que si l’on déplie leurs filaments contenus dans une cuiller à soupe, ils atteignent la longueur d’un kilomètre… Notre forestier finira par donner sa démission pour se consacrer à la défense des arbres…

Comme vous et moi, presque

Les auteurs de cette BD nous font découvrir la vie des arbres à travers le regard de Peter Wohlleben qui, manifestement, aime d’amour les arbres. Du coup, l’énorme somme d’informations que nous livrent les auteurs n’a rien d’un cours froid et indigeste, nous vibrons à chaque découverte de Wohlleben lequel, au grand jamais, ne cherche à nous endoctriner… mais son amour est contagieux ! On y apprendra, entre autres, que les arbres communiquent entre eux, que des récentes expériences semblent montrer que les végétaux émettent des sons, qu’ils ont une mémoire… et que vivre en plantations uniformes, tous les mêmes en rangs serrés, détruit leur vitalité, ils ne communiquent plus entre eux… et qu’il faut 500 ans pour qu’une forêt « cultivée » redevienne une forêt primaire… 

À la sortie du livre, Sandra Lorenzo avait écrit dans Le Huffington Post : « Quand on sait qu’un arbre est sensible à la douleur et a une mémoire, que des parents-arbres vivent avec leurs enfants, on ne peut plus les abattre sans réfléchir, ni ravager leur environnement en lançant des bulldozers à l’assaut des sous-bois ». Nous pourrions en faire notre conclusion. Ajoutons, pour le fun, que Wohlleben, en français, pourrait être traduit par : « bien vivre » … notre forestier aurait-il été inspiré par son patronyme ?

Mathias Lair

Fred Bernard & Benjamin Flao, La vie secrète des arbres, Les Arènes, octobre 2025, 236 pages, 39 euros

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