Primo Levi à Auschwitz, une belle biographie illustrée

L’expérience des camps de concentration a profondément marqué Primo Levi, auteur de Si c’est un homme. Connaissant son désir de transmettre, Matteo Mastragostino imagine une rencontre entre le grand écrivain et une classe, d’abord dissipée, puis simplement émue, comme il le fut lui-même quand, enfant, il appris la mort du grand écrivain italien.

 

Primo Levi relate aux enfants son expérience concentrationnaire. Arrêté en août 1943 avec un groupe de résistants italiens (sans doute les moins efficaces et alors que lui-même refusait de porter une arme), il doit à sa culture et à sa formation de chimiste d’avoir survécu, et même s’il était très légèrement mieux loti que ses camarades, il a vécu l’inhumain. La sélection, les coups, la mort qui rôde, le froid, les camarades qui deviennent pour leur survie eux-mêmes des bourreaux, le travail forcé, l’épuisement permanent, les courses hebdomadaires pour savoir si l’on est apte encore ou si l’on va être supprimé, l’humiliation (par la nudité, par la dégradation ultime et au final par l’animalisation et ce constat douloureux : « nous ne sommes rien d’autre que des bêtes »…) mais aussi ce petit répit quand un travailleur volontaire du camp lui sauve la vie en lui donnant un peu à manger et quelques vêtements, parce qu’ils sont tous les deux piémontais (Primo Levi est emprisonné comme Juif pas comme Italien).

 

Je ne prétends pas que vous compreniez. Je sais que c’est impossible. Ce que nous craignions, c’est de ne pas être crus, que tout soit oublié. »

 

Une telle expérience ne peut pas être comprise par des enfants d’aujourd’hui, mais bien vite ils ne chahutent plus et écoutent ce vieux monsieur calme leur parler d’un monde cruel où l’homme n’en est plus un tout à fait, quel que soit le côté du fusil où il se trouve. Toute la classe fait corps autour du vieil homme qui devant elle, à l’évocation de ses souvenirs, n’a pas pu retenir ses larmes.

Les dessins crayonnés sont magnifiques, avec une vraie intelligence des variations entre le détaillé et le dépouillé qui donnent une épaisseur à l’environnement concentrationnaire et à la fois une fragilité aux prisonniers.

Une très belle introduction à la question concentrationnaire et à l’oeuvre du grand écrivain Primo Levi.

 

Loïc Di Stefano

Matteo Mastragostino (texte) et Alessandro Ranghiasci (dessin), Primo Levi, traduit de l’italien par Marie Giudicelli, Steinkis, septembre 2017, 128 pages, 16 euros

 

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