Tulip, le testament de Dashiell Hammett

« — Des mots tout ça. Si tu as tellement d’histoires à raconter, comment ça se fait que tu n’as pas écrit depuis un bail ? »

 

Le mystère Dashiell Hammett

Depuis des années, les lecteurs (nombreux) et les critiques (un peu moins) se demandent comment Dashiell Hammett, l’auteur de La Moisson rouge et du Faucon maltais, a pu cesser d’écrire dans les années 30. Panne d’inspiration ? La faute à la maladie et à l’alcool ? Ou alors a-t-il gâché son temps à Hollywood où il était sous contrat ? Il y rencontra en tout cas Lilian Hellman, qu’il aida certainement pour écrire ses pièces et ses scénarii, du moins au début. En 1951, Hammett, homme autrefois proche du parti communiste, refusa de donner des noms à la commission McCarthy et fit de la prison. Il était alors vraisemblablement sur le roman Tulip, qui resta inachevé et fut publié après sa mort sous l’égide de Lilian Hellman, son meilleur spécialiste américain.

 

[…] L’un des ennuis avec toi, c’est que tu es toujours trop bien certain de me comprendre. / — La plupart du temps, je ne pense pas te comprendre. Là où nous divergeons, c’est que je ne crois pas qu’il y ait grand-chose dans tout ça qui mérite un effort de compréhension. »

 

Un roman aux accents autobiographiques

L’argument est simple : le narrateur voit revenir Tulip, un de ses camarades d’armée. Les deux hommes entament un dialogue où Tulip, personnage volubile, raconte sa vie. Pour autant, il semble surtout un mythomane aux yeux d’un narrateur revenu de tout, qui ressemble beaucoup à Hammett : lui aussi a fait de la prison à cause de la commission des activités antiaméricaines.

Ces 90 pages constituent un jeu du chat et de la souris, avec des dialogues assez savoureux : on y retrouve la patte d’Hammett, celui du Faucon maltais.  Enfin, notons que le narrateur est aussi écrivain, souffre d’un blocage d’inspiration et essaie de terminer un livre : belle mise en abyme…

Publié presque dans l’indifférence en 1966, Tulip est un ultime témoignage du talent d’Hammett, un excellent écrivain dont James Ellroy, pourtant aux antipodes politiquement parlant, ne cesse de parler en bien. À découvrir, une fois lu ses grands romans.

 

Sylvain Bonnet

Dashiell Hammett, Tulip, traduit de l’anglais par Janine Hérisson et Henri Robillot et revue par Nathalie Beunat, préface de Nathalie Beunat, Gallimard, « Folio », mai 2017, 105 pages, 2 euros

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