Monsieur le Commandant, le roman de Romain Slocombe en BD

La couverture de Monsieur le Commandant ne laisse aucun doute, on ne s’attend pas à un conte pour enfants. Cette bande dessinée, adaptée du roman de Romain Slocombe par Xavier Bétaucourt et Etienne Oburie, décrit en image non seulement une époque obscure de notre pays et d’autres part les relations familiales exacerbées par la différence.

Votre beau pays n’est pas un problème, les bolcheviks, les francs-maçons, les juifs… ce sont eux les vrais ennemis de la France ! 

Froid dans le dos

Paul-Jean Husson est un écrivain français respecté, il accueille en famille son fils venu lui présenter sa fiancée. Olivier Husson est musicien et Ilse est allemande et actrice de cinéma. Ayant eu une éducation du plus haut niveau, elle ne se départ pas dans cette famille bourgeoise. Elle est charmante et conquiert rapidement sa belle-famille, peut-être même un peu trop, le père tombe littéralement sous le charme. Nous sommes en 1932. Les mois passent, les années s’écoulent et à part le regard obsédant vis-à-vis de sa bru, un premier enfant naît puis un second. Paul-Jean Husson a perdu son épouse et la guerre éclate, son fils part pour Londres et sa belle-fille est hébergée dans la maison familiale.

Ce héros de la Première Guerre, qui y a perdu un bras, découvre qu’Ilse est juive. Et malgré son antisémitisme brut, il fait jouer ses relations pour tenter de faire disparaitre toutes traces de son passé. Mais la France est envahie et de lugubres évènements vont bousculer la vie bien rangée de ce duo.

« C’est plus courageux de porter l’étoile au grand jour que de se cacher ! »

Nous sommes partagés à l’idée de lire le roman que les auteurs ont adapté ou de rester sur cette lecture. Le roman doit être éprouvant à lire avec tant de violences et de drames familiaux. Pour ma part, je resterai sur la lecture de ce roman graphique mis en scène avec justesse, traité avec un grand soin par la qualité du dessin et de la composition choisie.

L’attention apportée de nos jours à la couverture des bd ne fait que renforcer cette fois-ci le drame qui va se jouer derrière ces pages. 

Il est à noter l’effort important d’Etienne Oburie à se renouveler à chaque nouvelle création. Monsieur le Commandant est, en tout cas, très différent de son travail sur Simone Veil paru chez Steinkis en 2020. Il a pris toute la mesure du drame et de la tension qu’il a illustré avec beaucoup de puissance narrative. Ses précédents albums n’ont pas toujours connu le succès : celui-ci devrait le révéler au grand public même si le sujet est pesant.

Philéas s’approprie pleinement la spécialité d’adapter les romans en bande dessinée. Et ce nouvel exemple est parfaitement réussi.

Xavier de La Verrie

Xavier Bétaucourt et Etienne Oburie, d’après le roman de Romain Slocombe, Monsieur le Commandant, Philéas, janvier 2022, 77 pages, 17,90 eur

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