« Aliens : Frénésie », 44 artistes pour une histoire étonnante

L’intrigue générale d’Aliens : Frénésie est tout ce qu’il y a de classique. Mais cet album se démarque par le nombre impressionnant de dessinateurs (plus de 40 !) et une astuce originale pour gérer la diversité graphique qui en découle. Un comics étonnant.

 

 

 

Depuis plusieurs mois, un somptueux vaisseau de croisière, le Lunar Maru, dérive dans l’espace au milieu d’une ceinture d’astéroïdes. L’équipage du Saint Clair est dépêché pour enquêter. Une fois à bord, Reyes, Hyde, Cleg et les autres découvrent un vaisseau vide : tous les passagers sont morts, manifestement à la suite d’une coupure des systèmes de survie du Lunar Maru. Malheureusement l’équipage du Saint Clair, plusieurs Aliens ont survécu…

 

Le style d’Arthur Adams est immédiatement identifiable

 

Quarante artistes de renom pour un album !

On sera en droit d’être inquiet en lisant la très longue liste des artistes participant à Aliens : Frénésie (Aliens : Havoc, en VO). Car pas moins de 40 dessinateurs ont planché sur cet album ! Et pas des moindres, puisqu’on retrouve de très grands noms de la bande-dessinée américaine et européenne comme Duncan Fregedo, Arthur Adams, Geof Darrow, George Pratt, Guy Davis, Kevin Nowlan, Travis Charest, P. Craig Russel, Sean Phillips (Fondu au noir, Kill or be killed, Criminal), Gene Ha, Sergio Aragonés, Moebius, Mike Allred ou David Lloyd. Liste évidemment non-exhaustive, mais qui donne déjà une idée du niveau des artistes impliqués dans Aliens : Frénésie.

 

Le trop rare Travis Charest

 

Des styles compatibles ?

Je ne vous cache pas que j’ai eu une certaine crainte en ouvrant Aliens : Frénésie. Car si le talent de ces artistes n’est plus à refaire, leurs styles sont tout de même très variés, voire parfois totalement opposés. Pour exemple, imaginez un instant passer d’une page dessinée par Aragonés (au style cartoony) à une page dessinée par Travis Charest (au style réaliste). Tous les lecteurs de comics l’ont vécu un jour ou l’autre : le changement de style peut vraiment sortir le lecteur de sa lecture. D’autant plus qu’une bonne histoire d’Aliens repose essentiellement sur une ambiance oppressante (si vous avez un doute, lisez Aliens : Perdition). Le scénariste Mark Schultz allait-il parvenir à gérer cette grande équipe d’artistes ? Et surtout, parviendrait-il à justifier ces ruptures de styles inévitables ?

 

Sergio Aragonès dessinant du Aliens.

 

Les clichés de la saga Alien

On passera sur l’intrigue générale d’Aliens : Frénésie qui enchaine les clichés de la saga Alien. Ainsi, on retrouve évidemment la scène d’exploration d’un vaisseau abandonné et infesté d’Aliens, l’équipage de sauveteurs qui commencent à comprendre que ça en sera pas une partie de plaisir, l’irruption surprise d’Aliens, la trahison des synthétiques, etc. Mark Schultz ne révolutionne pas le genre et colle au cahier des charges propres à ravir tout fan de la saga. Et il a bien raison, car il a autre chose à gérer : cette fameuse hétérogénéité des dessins.

 

Un autre des grands noms de cet album : Moebius !

 

Possession

Très rapidement, Mark Schultz introduit une notion inédite dans la saga Alien : l’esprit d’une des victimes du Lunar Maru « hante » les couloirs du vaisseau. Pendant quelques secondes, il peut investir le corps d’un être vivant pendant quelques secondes avant de changer d’hôte. Sur les premières pages, cette idée de possession est déconcertante. Mais une fois installée et comprises, son potentiel est incroyable ! Mark Schultz l’utilise de 3 manières : pour faire monter le suspense, pour expliquer ce qu’il s’est passé à bord du Lunar Maru et pour gérer la diversité graphique des artistes !

 

La plupart des cases sont dessinées à la première personne, donnant l’impression que les personnages s’adressent au lecteur.

 

Une planche, un dessinateur

Le principe est simple : chaque dessinateur d’Aliens : Frénésie s’est vu confier l’illustration d’une planche. Et Mark Schultz d’expliquer que chaque planche correspond à une possession. L’idée, audacieuse, s’avère visuellement bourrée de potentiel. Concrètement, l’histoire est dessinée à la première personne : on voit ce que vois l’hôte « possédé » par « le fantôme du Lunar Maru ». Les ruptures graphiques se trouvent ainsi justifiée par le fait qu’on change d’hôte page après page ! Au bout de quelques pages, cette trouvaille s’avère particulièrement jouissive et l’effet particulièrement immersif car parfaitement intégré à l’ambiance. Enfin, Aliens : Frénésie est publié avec le standard de qualité habituel des éditions Wetta : papier et traduction de qualité, couverture bien épaisse, c’est dire si on est gâté. Un (tout petit) regret : que l’éditeur Wetta n’ait pas intégrer les 4 pages de making of de la version originale. Reste une question que vous vous posez certainement : un esprit humain peut-il posséder un Alien ? La réponse, vous la lirez dans Aliens : Frénésie !

 

Stéphane Le Troëdec

 

 

Mark Schultz (scénario) et une ribambelle d’artistes aux dessins, Aliens : Frénésie, traduit de l’anglais par Fred Wetta, Wetta Comics, juillet 2018, 56 pages, 16,50 euros

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