Tube story, les petites histoires des grandes chansons

Il y a les chansonnettes, petites mélodies vite oubliées. Et puis il y a des chansons qui traversent le temps. Art mineur, expliquait Serge Gainsbourg à juste titre, mais art malgré tout, la chanson perdure quand elle a du fonds. Car sinon, l’on dit que c’est un tube parce qu’il est creux… Astrid Cornet propose d’en découvrir une vingtaine, dans son album illustré Tube story.

Et on remet le son

Si l’affaire n’est pas tout à fait originale (1), l’ampleur et le traitement le sont. L’ampleur, parce qu’Astrid Cornet s’attache à des chansons emblématiques quelle qu’en soit l’origine. Et le traitement, parce que les explications passent par des saynètes illustrées, drôle, vivante, souvent décalée mais toujours justes. Une illustration pleine page, suivie de une à quatre pages d’histoire. Entre chacune, il y a une page de fun fact, comme un intermède, qui vient raconter une chanson en moins de cases.

De Yesterday des inaltérables Beatles à Wanabee des Spice Girls (dont la qualité de « grande chanson » reste discutée, parce que très discutable, malgré son succès mondial et l’ère festif des textes idiots qui misent plus sur le sexy des chanteuses que… tout le reste ; d’ailleurs elles ont appris à chanter et à danser après avoir été choisies…), tous les styles y passent. Du Rock des Rolling stones (Satisfaction) au grunge de Nirvana (Smells Like Teen Spirit), de la soul d’Amie Whinehouse (Rehab, dont pourtant le titre est lipide…) en passant par la chanson française (Claude François, Edith Piaf, Patrick Hernandez, Michel Berger, Il était une fois) et le jazz (Billie Holyday) ou l’électro de Daft Punk (Around the world), il y en a pour tous les goûts.

« Tout finit par des chansons. »

Il y a bien cette étrange Lettre à Elise de Beethoven, qui n’est pas une chanson, ni même un tube à proprement parler, bien que Dario Moreno en ait fait l’incroyable Tout l’amour, ce sera un pas de côté… Et encore, cela fait chansonnette, comparé au Requiem de Mozart, messe des morts (dixit) en latin d’une solennité inestimable. Tout comme le God save the Queen, qui, certes, lui a donné l’envie de faire cet album, mais de là à parler d’un tube, shocking ! Bien sûr, il y a la version punk, qui sauve tout, mais de là à faire l’éloge d’une chanson qui se gosse de la fistule au fondement du grand roi Louis XIV… (Ce sera le seul « secret » dévoilé). Il n’y a pas d’ordre non plus, ni chronologique, ni géographique, ni préface, rien pour guider le lecteur. Mais cet apparent fatras permet de découvrir en se promenant d’une chanson à l’autre. L’absence de table des matières concourt à cette impression également.

Ne boudons pas notre plaisir. Même un vieil aigri (comme moi) qui connait toutes ces chansons et une grande partie de leur histoire trouvera de quoi s’étonner et s’amuser, sur un fait touchant l’écriture des textes ou des mélodies, la production, voire l’origine ou la postérité. Cet album est beaucoup plus riche qu’il n’y paraît. Tube story est une balade très agréable dans les coulisses de chansons qui ont marqué leur temps. Le test est simple : on pourrait les fredonner toutes. De Jean-Jacques Goldman à Michael Jackson, de Barbara à Queen, de Stromae à Aretha Franklin, Astrid Cornet met son talent d’illustratrice et son humour au service du plus majeur des arts mineurs, la chanson.

Loïc Di Stefano

Astrid Cornet, Tube story, les petites histoires des grandes chansons, Hachette, novembre 2023, 96 pages, 17,99 euros

(1) Fabien Lecœuvre a commencé à publier ce genre d’histoires dès 1970 et ses Petites histoires des grandes chansons… Suivront bon nombre d’ouvrages sur les histoires insolites, cachées, rares, de la chanson ou de tel chanteur.

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