Immobilité, le survivant

Un auteur encore peu connu pour une nouvelle collection

On ne connait pas encore Brian Evenson, ancien prêtre mormon et auteur de La confrérie des mutilés (Le Cherche midi, 2008) et d’Inversion (Le cherche midi, 2006). Notons qu’il a reçu le prix Shirley Jackson en 2019 pour un recueil de nouvelles pas (encore ?) paru en français. Les éditions Rivages qui lancent leur nouvelle collection « Imaginaire » ont choisi, après l’Ile de silicium de Chen Qiufan, de publier Immobilité d’Evenson.

Après la catastrophe

Quand ils le réveillèrent, c’était comme si le monde redevenait réalité et lui avec. Aucun souvenir d’avoir été stocké. Pas trace de sa vie avant le Kollaps, et les jours précédant directement son stockage étaient noyés dans un brouillard, rien de plus qu’une poignée d’images figées. Il revoyait par fragments le Kollaps, des bribes de sa fuite essoufflée lui revenaient en mémoire, des émeutes, des détonations, des décombres.

Quelque part, on réveille un homme d’un long sommeil. Il ne se rappelle rien, sauf, après un moment de son nom : Josef Horkaï. Il se rappelle une catastrophe (nucléaire apparemment) qui a détruit le monde. Lui a été sauvé par le père de Rasmus. Ce dernier a une mission pour lui : aller chercher un cylindre dans un bâtiment à l’autre bout des ruines de ce qui fut une agglomération. Horkaï est le candidat idéal car il a développé une résistance incroyable aux radiations. Mais il est paralysé en-dessous de la taille et Rasmus lui adjoint les services de Qanik et Qatik pour le porter et l’emmener au lieu de sa mission. Ses porteurs lui paraissent étranges, un peu idiots.

Lorsqu’ils le laissent ramper dans le bâtiment, ils ne savent pas qu’Horkaï va rencontrer un de ses semblables, un autre mutant résistant aux radiations. Et surtout le vrai sens de sa mission : le cylindre contient des embryons humains viables…

Un roman tragique

Immobilité est un roman tragique. Le monde décrit est celui de l’après-guerre nucléaire, celui qui a hanté l’Occident pendant la guerre froide et qui revient désormais dans nos imaginaires depuis l’invasion de l’Ukraine. Horkaï est un pion, malgré ses qualités (et sa violence) dans un jeu qui le dépasse, on le comprend au fur et à mesure de la lecture.

Immobilité provoque chez le lecteur des réflexions sur la nature humaine, voire post-humaine. C’est donc au final un bon roman d’anticipation.

Sylvain Bonnet

Brian Evenson, Immobilité, traduit de l’anglais par Jonathan Baillehache, Rivages, « imaginaire », janvier 2023, 256 pages, 21 euros

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